Le Journal de Quebec

L’enquête sur l’affaire russe approche du but

- PIERRE MARTIN @Pmartin_udem

Avec la mise en accusation de treize individus et trois organisati­ons russes, l’enquête du procureur spécial Robert Mueller a franchi un cap important, mais des questions fondamenta­les subsistent, comme une épée de Damoclès suspendue au-dessus de l’avenir politique du président.

L’acte d’accusation de vendredi expose comment des agents du régime de Vladimir Poutine ont cherché à « semer la discorde » dans le système politique américain. Ils ont assez bien réussi.

La loi américaine interdit toute interventi­on étrangère dans les campagnes électorale­s. Le dépôt de ces accusation­s signifie que le procureur possède des preuves tangibles d’activités illégales. L’ingérence russe n’était pas un mythe.

Trump, qui avait longtemps nié cette ingérence, affirme que ces accusation­s ne visent pas sa campagne. L’acte d’accusation mentionne toutefois que des Américains ont collaboré avec les Russes, sans les nommer. Ça viendra peut-être bientôt.

COLLUSION ?

S’ils restent chez eux, ces Russes n’ont pas grand-chose à craindre, mais leur accusation ouvre la porte à une première grande question : la campagne Trump a-t-elle collaboré avec eux ?

On parle beaucoup de « collusion », mais ce que le procureur doit démontrer au sens de la loi est si les proches de Trump ont « comploté » avec ces Russes. Pas facile.

Si plusieurs indices connus publiqueme­nt appuient cette hypothèse, ils sont encore insuffisan­ts. Mueller en sait beaucoup plus, mais il ne dévoilera son jeu que lorsqu’il aura toutes les preuves en main.

Pour le moment, l’intérêt de l’enquête réside surtout dans l’identifica­tion de liens entre des membres du clan Trump et la Russie.

L’enquête s’intéresse notamment à Paul Manafort, directeur de campagne de Trump pour quelques mois, qui a fait des millions en s’associant à des proches de Vladimir Poutine, notamment son régime fantoche en Ukraine.

Comme Mueller en sait assez sur Manafort pour qu’il finisse ses jours en prison, ce dernier a tout intérêt à se mettre à table.

Au-delà de Manafort, l’enquête explore d’autres questions troublante­s : Trump a-t-il entretenu des liens financiers peu cachères avec des Russes ? Poutine détient-il des informatio­ns compromett­antes qui exposeraie­nt Trump au chantage ?

JUGEMENT FINAL

On comprend pourquoi Donald Trump s’évertue à minimiser la portée de l’affaire russe et à questionne­r la crédibilit­é des enquêteurs.

D’abord, cette ingérence fait de l’ombre à la légitimité de sa victoire, mais on peut se demander si son refus absolu de critiquer Vladimir Poutine n’a pas des motifs plus obscurs.

Peu importe ce que le procureur pourrait lui reprocher, Trump sait que le jugement final du Congrès ou des électeurs sera politique. En critiquant constammen­t la crédibilit­é des enquêteurs, il s’assure que sa base d’appui restera inamovible et que les républicai­ns du Congrès hésiteront à le confronter.

UN SCANDALE PARMI D’AUTRES

De toute façon, l’administra­tion Trump est prise dans tellement de scandales à la fois que le public ne les voit même plus, et l’avancement inexorable de l’enquête Mueller continuera de passer inaperçu jusqu’au jour où l’épée de Damoclès tombera.

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