Vigneault en territoire inconnu
Avec plus de 1300 matchs au compteur, Alain Vigneault en a vu de toutes les sortes dans sa carrière d’entraîneur de la Ligue nationale de hockey. Mais il se trouve dans une position inusitée depuis que la haute direction des Rangers a fait savoir dans une lettre à ses partisans il y a deux semaines qu’elle procéderait à la reconstruction de l’équipe.
Cette décision n’a pas été prise du jour au lendemain. Elle est l’aboutissement d’une réflexion amorcée en décembre dernier par le président du conseil d’administration du Madison Square Garden, James Dolan.
Peu avant la dernière période des Fêtes, Dolan a demandé à Vigneault s’il croyait être en mesure de remporter la coupe Stanley avec la formation en place. Les Rangers occupaient le septième rang dans l’association de l’est, mais ils n’en présentaient pas moins une fiche respectable.
« J’ai répondu à mon propriétaire que je n’avais pas gagné la coupe avec des équipes supérieures en deux participations à la finale (avec les Canucks en 2011 et les Rangers en 2014) », de me raconter Vigneault lors d’un entretien téléphonique, hier.
« Mais je lui ai ajouté qu’on pouvait se qualifier pour les séries et que tout serait possible à partir de là. »
SIGNE ANNONCIATEUR
En janvier, le New York Post a rapporté que les Rangers avaient décidé de se placer en mode vente afin de procéder à une reconstruction. Les joueurs ont été ébranlés.
« Cette histoire a affecté la chimie de l’équipe », dit Vigneault.
« Sur le plan sportif, une seule chose prime dans une organisation : c’est l’état des troupes. Quand une nouvelle du genre qui a été publiée dans le Post tombe, l’attention des joueurs est portée ailleurs. »
Malgré un mois de janvier difficile, les Rangers se sont maintenus dans la course aux séries. Mais la direction n’en faisait pas moins une lecture différente de la situation.
Une ou deux journées avant d’informer le public de leur plan, le président de l’équipe Glen Sather et Dolan en ont informé le directeur général Jeff Gorton, et Vigneault. Les Rangers n’étaient qu’à trois points d’une place dans les séries en dépit de leurs insuccès de janvier.
PAS SIMPLE POUR LES ENTRAÎNEURS
Comment Vigneault compose-t-il avec la situation ?
« Je suis content que notre entreprise fasse montre de transparence », répond-il en premier lieu.
« Mais pour moi et mon personnel d’entraîneurs, ce n’est pas simple. Ce n’est pas facile. »
Car les entraîneurs travaillent au quotidien. Leur sécurité d’emploi va au gré du rendement de leur équipe.
Aussi, quand on demande à Vigneault s’il est déçu de la tournure des événements, il répond comme le ferait tout entraîneur.
« On est là pour gagner, continuet-il. Là, on se retrouve en territoire inconnu. Je comprends la décision qui a été prise. Ce sont mes patrons. »
FEUILLE DE ROUTE IMPRESSIONNANTE
Vigneault parle comme tout bon homme d’entreprise. Mais on sent bien qu’il est tenaillé.
Les entraîneurs ne se comptent jamais pour battus. Ils travaillent comme des fous jusqu’à ce qu’on leur enlève leur emploi.
Malgré ses deux défaites en finale de la Coupe Stanley, Vigneault montre une feuille de route impressionnante depuis son retour dans la LNH, en 2006-2007.
Il est l’entraîneur totalisant le plus grand nombre de victoires depuis avec 532. Ses 129 matchs en séries et ses 22 rondes des séries lui confèrent le deuxième rang dans chaque catégorie.
« On dit que le seul pouvoir d’un entraîneur réside dans l’utilisation qu’il peut faire de ses joueurs, mais ce n’est pas tout à fait ça », reprend-il.
« Le pouvoir d’un entraîneur, c’est de rassembler son équipe et de faire en sorte que chaque joueur croit qu’il peut gagner dans une cause commune. Le hockey est un sport d’équipe. J’ai eu la chance de miser sur des joueurs qui comprenaient ça.
« Quand tu es capable de donner la bonne direction aux joueurs, ça peut te conduire loin. Je ne connais pas un joueur qui veut faire mal paraître son équipe. »