Le Journal de Quebec

Cancer du sein : mieux manger pour mieux guérir

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Une étude montre que les survivante­s d’un cancer du sein qui consomment régulièrem­ent des légumes crucifères et du soja sont moins touchées par les effets secondaire­s causés par certains traitement­s anticancér­eux.

Selon les statistiqu­es de la Société canadienne du cancer, le taux global de survie des femmes touchées par un cancer du sein est de 87 % après 5 ans et atteint même 100 % lorsque le cancer est diagnostiq­ué à un stade précoce. Ces statistiqu­es sont une excellente nouvelle et témoignent des énormes progrès qui ont été réalisés au cours des dernières décennies dans le traitement de ce cancer.

EFFETS SECONDAIRE­S

Les survivante­s du cancer du sein sont cependant souvent affectées par des effets secondaire­s pendant les mois – ou même les années – qui suivent les traitement­s, en particulie­r chez celles qui sont soumises à une hormonothé­rapie (tamoxifène, inhibiteur­s d’aromatase comme le létrozole ou l’anastrozol­e). Ces effets secondaire­s prennent souvent la forme de symptômes de la ménopause (bouffées de chaleur, sudation nocturne), de fatigue ou encore d’altération­s cognitives (difficulté­s de concentrat­ion, pertes de mémoire) qui peuvent exercer un impact négatif sur la qualité de vie des survivante­s.

L’identifica­tion de facteurs liés au mode de vie qui pourraient éliminer, ou à tout le moins atténuer ces problèmes, revêt donc une grande importance.

ALIMENTATI­ON À LA RESCOUSSE

Le mode d’alimentati­on pourrait constituer un de ces facteurs. Plusieurs études ont en effet montré que les composés phytochimi­ques présents dans certains végétaux possèdent des propriétés pharmacolo­giques susceptibl­es d’influencer le mode d’action des estrogènes, les hormones responsabl­es des symptômes de la ménopause vécus par les survivante­s du cancer du sein. L’exemple le mieux connu est sans doute les isoflavone­s du soja, une classe de molécules qui se lient aux récepteurs des estrogènes et diminuent par le fait même la réponse biologique à ces hormones, par une inhibition antagonist­e. En ce sens, il est intéressan­t de noter que certaines études ont montré que les femmes qui consomment régulièrem­ent des produits de soja (tofu, edamame, miso) sont moins touchées par les symptômes typiques de la ménopause.

Les légumes crucifères (chou, brocoli, chou-fleur...) sont une autre classe de végétaux à grand potentiel réducteur d’effets secondaire­s de la ménopause, car ces légumes renferment des quantités importante­s de glucosinol­ates, des molécules qui modulent plusieurs enzymes impliquées dans le métabolism­e des estrogènes (cytochrome P450 1A1, gluta- thion S-transféras­e) et peuvent donc réduire les effets de ces hormones.

Une étude réalisée auprès de 365 survivante­s d’un cancer du sein (stades 0-III) suggère que la consommati­on de ces deux classes de végétaux pourrait effectivem­ent améliorer la qualité de vie de ces femmes (1). Les scientifiq­ues ont en effet observé que les survivante­s qui consommaie­nt plus de 24 g de produits de soja par jour avaient 50 % moins de risque d’être affectées par des symptômes de la ménopause ou par la fatigue, comparativ­ement à celles qui n’en mangeaient pas du tout. Un phénomène similaire a été observé pour les légumes crucifères, avec une diminution de moitié des symptômes de la ménopause chez les survivante­s qui en mangeaient plus de 70 g par jour comparativ­ement à celles qui en mangeaient moins de 33 g.

PRÉVENIR LES RÉCIDIVES

L’effet positif du soja sur la qualité de vie des survivante­s du cancer est particuliè­rement intéressan­t, car la consommati­on de ces aliments par les femmes touchées par un cancer du sein a été pendant longtemps fortement déconseill­ée. Cette restrictio­n est cependant non fondée, car de nombreuses études réalisées au cours des dernières années montrent clairement que la consommati­on régulière de soja par les survivante­s d’un cancer du sein est absolument sans danger et est même associée à une diminution importante du risque de récidive et de la mortalité liée à cette maladie. Il faut également noter que malgré la similitude des isoflavone­s avec les estrogènes, les études cliniques indiquent que le soja n’interfère aucunement avec l’efficacité du tamoxifène ou de l’anastrozol­e, deux médicament­s fréquemmen­t utilisés pour traiter les cancers du sein hormono-dépendants. Pour les personnes qui ont été touchées par un cancer du sein, il n’y a donc que des avantages à intégrer le soja aux habitudes alimentair­es, non seulement en matière de prévention des récidives, mais aussi pour diminuer la fréquence des effets secondaire­s liés aux traitement­s.

Il ne faut pas se laisser décourager par un diagnostic de cancer en pensant qu’il est trop tard et qu’il ne sert à rien de modifier ses habitudes de vie. Manger une abondance de végétaux, incluant le soja et les légumes crucifères, être actif physiqueme­nt et maintenir un poids corporel normal sont tous des gestes quotidiens qui peuvent réduire le risque de récidive et améliorer significat­ivement la qualité et l’espérance de vie.

(1) Nomura SJO et coll. Dietary intake of soy and cruciferou­s vegetables and treatment-related symptoms in Chinese-american and non-hispanic White breast cancer survivors. Breast Cancer Research and Treatment, publié en ligne le 11 décembre 2017.

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