Le parcours inspirant de Shaquem Griffin
Amputé de la main gauche, Shaquem Griffin se rapproche de la NFL
INDIANAPOLIS | Toute sa vie, Shaquem Griffin n’a pas bronché en se faisant inlassablement répéter qu’il était impossible de jouer au football avec une seule main. Il a plutôt confondu les sceptiques de son enfance jusqu’à l’université. Voilà que l’improbable rêve de la NFL devient plus que jamais accessible.
Le secondeur a fait sensation, hier, au Combine de la NFL à Indianapolis, en complétant 20 répétitions de 225 livres au développé couché (bench press). Jusque-là, pour tout espoir aspirant à la grande ligue, rien de si extraordinaire ou anormal.
Là où la réussite de Griffin est remarquable, c’est qu’à quatre ans, il a dû subir l’amputation de la main gauche. Minés par le syndrome des brides amniotiques, ses doigts ne se développaient pas et la douleur devenait insoutenable. La seule solution qui s’imposait, aussi draconienne qu’irrévocable, était l’amputation.
Son frère jumeau Shaquill, demi de coin repêché l’an dernier en troisième ronde par les Seahawks, n’a pas eu cette déveine.
Les deux inséparables, tout jeunes, ont alors scellé un pacte : ils joueraient tous les deux au football, toujours dans les mêmes programmes. Shaquem, malgré son handicap, l’a toujours suivi.
« Les questions à mon sujet sont là depuis que j’ai commencé à jouer au football. À chaque niveau, j’ai dû faire taire mes détracteurs et je n’ai jamais eu de problème à le faire », a-t-il noté, hier, après son exploit.
PARCOURS INSPIRANT
Lorsque son frangin Shaquill a été recruté par Central Florida (UCF), il a posé avec cran une condition non négociable : son frère Shaquem devait le suivre.
L’équipe a accepté, mais Shaquem a vite compris qu’il devrait encore et toujours faire ses preuves. Pendant trois ans, il n’a que très peu vu de terrain.
Puis, en 2016, sa patience a été récompensée. Grâce à 92 plaqués (dont 20 pour des pertes), 11,5 sacs du quart et une interception, il était catapulté vers le titre de joueur défensif de l’année dans sa conférence.
L’automne dernier, il a de nouveau brillé, mais à l’approche du repêchage de la NFL, les doutes ne se sont aucunement estompés à son sujet. Si bien qu’il a reçu une invitation tardive pour le Combine, à force de pression.
« Les gens entretiendront toujours des doutes à mon sujet, mais je suis à une étape plus près de tout ce que je peux accomplir. Je ne me retrouverai jamais un jour à me dire que je n’ai pas assez mis d’effort », a-t-il dit.
PAS DE LIMITE
La prestation d’hier, qu’il a pu réussir avec une prothèse, aura eu le mérite de faire écarquiller les yeux des détracteurs. Mais pas ceux de Shaquem Griffin.
« Personnellement, je ne suis pas impressionné. Je sais ce dont je suis capable. Les gens me demandent depuis toujours comment je peux jouer au football avec une seule main. Ça m’importe peu et tu ne peux pas passer ta vie à t’imposer des limites à ce que tu peux faire, peu importe que tu aies une main ou 30 mains », a-t-il tranché.
Le gourou du repêchage, l’analyste Mike Mayock, a résumé avec justesse à quel point il est temps que les perceptions changent au sujet de Griffin, lorsqu’il a rencontré les médias en fin de journée.
« Oubliez sa déformation. Ce gars-là est bien plus qu’une belle histoire, il est un authentique joueur de la NFL. Il donne de l’énergie à tout le monde autour de lui. »