Une histoire digne d’un Jamesbond
L’empoisonnement d’un ancien agent double russe en sol britannique relance les tensions en Europe
LE JOURNAL | Un scénario qui semble tout droit sorti d’un film se déroule en Angleterre, où un assassin russe aurait versé un poison dans le verre de bière d’un ex-agent double russe, selon ce que rapporte le quotidien The Sun.
Des experts britanniques du ministère de la Défense croient que Sergueï Skripal et sa fille Youlia auraient pu être empoisonnés avec une version modifiée du thallium, une toxine autrefois utilisée par Saddam Hussein.
Le père de 66 ans et sa fille de 33 ans étaient toujours hospitalisés et dans un état critique, hier, après avoir été retrouvés inconscients dans un centre commercial dimanche. Le poison aurait été mis dans les verres du duo alors qu’ils se trouvaient au Mill Pub, à Salisbury, à l’ouest de Londres.
Skripal a toujours vécu dans la crainte que les Russes se vengent, car il avait transmis aux services britanniques des informations sur l’armée russe, selon ce qu’ont dit des membres de sa famille au Sun.
À partir de 1995, et jusqu’à son arrestation en 2004, il avait notamment fourni l’identité de plusieurs dizaines d’agents secrets russes opérant en Europe. Il avait reconnu sa culpabilité et condamné en août 2006 à 13 ans de camp à régime sévère.
Après sa sentence, Skripal s’est réfugié en Angleterre, à l’issue d’un échange d’espions.
« ÇA FINIRAIT MAL »
« Il savait que ça finirait mal, qu’il ne serait pas laissé seul », a déclaré un proche au quotidien anglais.
Le décès en 2012 de l’épouse de Skripal à la suite d’un cancer et la mort de son fils à Saint-pétersbourg l’année dernière sont examinées dans le cadre de l’enquête, selon The Times. Le journal ajoute que l’affaire est traitée comme une tentative d’assassinat liée à la Russie.
L’événement vient raviver les tensions entre l’angleterre et la Russie, désignée par le passé comme une menace par les autorités politiques et militaires britanniques. Le ministre des Affaires étrangères Boris Johnson a déclaré hier que si l’enquête démontrait « la responsabilité d’un État », son gouvernement répondrait « de façon appropriée et ferme ».
« Aucune tentative de prendre une vie innocente sur le sol britannique ne restera impunie », a ajouté M. Johnson.
Le Kremlin a assuré n’avoir « aucune information ».
« Vous savez pourquoi il était en Occident, à la suite de quelles actions et décisions, je ne vais pas revenir là-dessus. Et maintenant, nous observons qu’une situation tragique a eu lieu », a assuré à la presse un porte-parole du président Vladimir Poutine. Il a soutenu que son pays était « disposée à coopérer » au dossier, mais n’avait pas été sollicité.
LONGUE CARRIÈRE
« Il parle comme si l’enquête était déjà terminée, comme si la Russie avait été jugée responsable de ce qui s’est passé », a affirmé de son côté un porte-parole de l’ambassade de Russie à Londres.
Sergueï Skripal avait connu une longue carrière au sein du GRU, les redoutables services de renseignements de l’armée russe, jusqu’à en devenir colonel.
Il était passé en 1999 au ministère russe des Affaires étrangères. Sa position privilégiée avait attiré l’attention des services de renseignements britanniques, qui l’avaient recruté à partir de 1995, selon ses déclarations à la justice russe.
– Avec Antoine Lacroix et L’AFP