Une nouvelle coroner en chef
Me Pascale Descary veut réduire le délai de production des rapports pour donner des réponses aux familles
Avocate et psychoéducatrice de formation, Me Pascale Descary vient d’être nommée à la tête du Bureau du coroner. En acceptant ce mandat de cinq ans, elle s’est donné la mission de réduire les délais de production des rapports des coroners pour soulager les familles endeuillées. Le Journal l’a rencontrée.
Six mois après être devenue coroner, vous avez été nommée coroner en chef. Expliquez-nous cette ascension rapide.
Six mois, c’est court, mais je suis ravie d’avoir pu vivre cette expérience-là parce que ça me permet de comprendre la réalité des coroners sur le terrain. Je suis moi-même un peu surprise, je n’avais pas prévu de devenir rapidement la chef du Bureau.
Qu’est-ce qui vous a amenée à passer d’ombudsman de l’université de Montréal à coroner ? Dans le cadre de mon deuxième mandat, j’ai eu à faire une enquête systémique sur les difficultés des résidents en médecine. Il y avait en trame de fond deux suicides d’étudiants et ça m’a permis de connaître davantage la fonction de coroner. J’ai vu un parallèle avec ma fonction d’ombudsman, soit de faire des enquêtes et d’avoir un pouvoir de recommandation. J’ai postulé.
Quelles qualités faut-il pour devenir un bon coroner ? Empathie, empathie, empathie. C’est une qualité essentielle parce qu’on travaille avec des familles en deuil. L’autre compétence très importante, c’est la rigueur dans les investigations. Il faut aller chercher toute l’information nécessaire pour arriver à un produit fini complet et de qualité.
Quelle sera votre priorité en tant que coroner en chef ? J’ai à coeur de réduire nos délais de production des rapports. Actuellement, on se situe environ à onze mois. C’est malheureux pour les familles endeuillées, qui ont besoin de réponses. On veut ramener ça à neuf mois dès l’année prochaine, mais on veut tendre vers le six mois. C’est une cible qu’on se donne. Les coroners à temps partiel ont-ils assez de formation ? C’est un autre axe que j’entends développer : la formation continue des coroners. Les juristes souhaitent avoir un peu plus de connaissances médicales, les médecins veulent davantage être informés sur les aspects administratifs, procéduraux, etc. Je veux leur donner le maximum de soutien. Ils mènent de front leur carrière professionnelle en plus d’accepter des mandats pour le Bureau du coroner, c’est loin d’être facile.
En plus des avocats, des notaires et des médecins, vous songez à permettre aux infirmiers et aux pharmaciens de devenir coroners ? Ça fait partie des discussions entamées par ma prédécesseure au niveau du cabinet du ministre. On est à l’étape de la réflexion. C’est sûr que ça peut être intéressant d’avoir un plus grand bassin de professionnels de la santé parce que l’établissement des causes de décès est souvent médical.
Quels sont les nouveaux enjeux avec lesquels les coroners doivent composer ? Les boissons alcoolisées sucrées, ayant mené à des décès récents chez nos jeunes. On a des coroners expérimentés qui font des investigations bien fouillées. Ça va sans doute donner lieu à des recommandations. C’est un phénomène de société auquel il faut s’attarder. Le dossier des opioïdes est aussi préoccupant. On fait une vigie avec la Santé publique pour connaître l’ampleur de la situation. On assiste nos coroners dans l’élaboration de recommandations pertinentes pour juguler la crise.
Avez-vous l’impression que les coroners font suffisamment de recommandations et que celles-ci sont entendues ? Ce n’est pas le nombre qui est important, c’est la pertinence. Quand on fait des recommandations, il faut qu’elles soient nécessaires pour améliorer une situation. Je peux vous dire qu’on est entendus, que les coroners ont une bonne crédibilité, mais c’est un travail en continu. Il faut continuer de marteler nos messages.