Une joute oratoire vive et intense
Race aborde la justice et les délicates questions de racisme
Un homme, blanc et riche, est accusé d’avoir agressé sexuellement une jeune femme noire dans une chambre d’hôtel. Un cabinet d’avocats a la lourde tâche de décider, ou non, de le défendre.
Après avoir essuyé un refus dans un premier bureau d’avocats, l’accusé, Charles Strickland, se tourne vers un cabinet constitué d’un associé de race blanche et d’un associé noir. Une situation qui amène dilemmes et débats. La cause est risquée.
Sur la route depuis le 19 janvier, la pièce Race, du dramaturge américain David Mamet, présentée Chez Duceppe, en 2016 s’arrêtait, hier, à la salle Albert-rousseau, pour la dernière date de la tournée.
Interprété par Frédéric Pierre, Harry Brown démontre des réticences. Cette cause, pour lui, ne sent pas bon et elle est perdue d’avance.
Jack Lawson, joué par Benoît Gouin, est intéressé par le défi. Un détail qu’il découvrira, à la lecture du dossier de l’enquête policière, lui permet de croire qu’il peut être possible de faire acquitter Charles Strickland (Gabriel Sabourin).
Les paillettes de la robe, qui sont fragiles, n’ont pas été retrouvées dans la chambre d’hôtel. Un signe que l’accusé, comme le prétend la victime, ne lui a pas arraché sa robe. « On a une cause », lance-t-il. Jack Lawson a l’intention d’utiliser cette information pour faire un spectacle, impressionner le jury et peut-être soulever un doute raisonnable, jusqu’à ce qu’un élément inattendu modifie l’état des choses.
RÉGLÉS AU QUART DE TOUR
Les avocats interrogent l’accusé, ils débattent entre eux et ils intègrent, dans leurs discussions, Susan, une jeune stagiaire de race noire, interprétée par Myriam De Verge.
L’accusé propose de faire une déclaration dans les médias, avouer son crime et souhaitant, ainsi, obtenir une certaine clémence. Ce que les avocats Lawson et Brown lui déconseillent fortement. Un doute peut être soulevé et il a d’excel- lentes chances d’éviter la détention.
Race est une joute oratoire ou les échanges sont vifs, rapides et percutants. L’intensité est présente et les comédiens sont solides avec des moments où l’on se coupe la parole et où les relances sont réglées au quart de tour. C’est livré rondement et avec peu de temps morts, sauf lors des quelques intermèdes musicaux qui séparent les différentes scènes.
Race est une oeuvre qui s’intéresse aux perceptions entourant les questions de racisme et les préjugés entourant la couleur de la peau. Elle aborde aussi, au-delà des questions de couleurs de la peau, la justice.
« Un homme coupable a l’air de quoi ?, un homme non coupable ressemble à quoi ?, demande Jack Lawson à la stagiaire.
Le cabinet d’avocats doit, parfois, aller au-delà de ses principes, même si l’on croit que l’accusé est peut-être coupable et que la cause semble perdue d’avance.
« J’ai essayé de vivre pauvre et je n’ai pas aimé ça. Toi non plus », adresse Lawson à son associé. Et l’on quitte la salle, la tête remplie de questions.