LA FIGURE QUÉBÉCOISE
Stéphanie Harvey est influente dans l’industrie mondiale des sports électroniques
Figure de proue des sports électroniques au Québec, Stéphanie Harvey a grandement aidé à démocratiser et démystifier son domaine dans la province depuis 15 ans. Sans se décrire comme une pionnière, la femme de 31 ans se démarque par ses nombreux chapeaux sur la scène internationale.
« Missharvey » ne laisse personne indifférent sur son passage. Elle vit à 100 km/h sa grande passion, les sports électroniques. Toutefois, elle ne tire pas ses principaux revenus des bourses des compétitions auxquelles elle participe à Counter Strike : Globale Offensive, un jeu de tir à la première personne disputé en équipe.
Elle fait plutôt la majeure partie de ses gains avec ses commanditaires internationaux et ses présences dans les grands événements électroniques de la planète.
« Mes gains annuels en tournoi ne sont vraiment pas représentatifs de mon salaire. Je ne suis pas dans les meilleurs joueurs au monde qui gagnent assurément un demi-million de dollars par année. Quand je me déplace pour être sur un panel d’experts dans un tournoi, c’est très lucratif », a expliqué celle qui revenait tout juste de Pologne quand elle a rencontré Le Journal, dans son patelin, à Québec, au début de mars.
« Un week-end comme je viens de faire équivaut à près d’un mois de salaire dans une équipe professionnelle, précise-telle. J’en fais plusieurs par année. »
Sa réputation et sa vaste expérience lui permettent de signer de juteux contrats, en plus de voyager à travers le monde, tous frais payés. C’est sans compter lorsqu’elle est la tête d’affiche d’une entreprise lors d’une diffusion en continu sur le web. Ces apparitions valent leur pesant d’or, car elle obtient une part des profits des ventes. Sa rémunération peut atteindre jusqu’à 1000 $ de l’heure.
ENTREPRENEURE
Avec ses mille et un projets en tête, Harvey est en quelque sorte une femme d’affaires. Bien qu’elle se dise mauvaise dans ce rôle, elle se débrouille avec succès. Elle souhaiterait développer des entreprises en parallèle aux sports électroniques, mais elle ne peut tout faire seule. Elle veut s’entourer des bonnes personnes. D’ailleurs, son agent, basé à Los Angeles, ne fournit plus à la demande.
« Je crois que je suis pourrie en affaires et ça me frustre. Mes projets sont lents, car je suis trop occupée. Il me faudrait une équipe autour de moi, mais je ne peux pas encore me le permettre financièrement, explique-t-elle.
Et pour me vendre, je ne suis pas très bonne. Je n’ai pas le sens des négociations. Mon agent peut facilement avoir le double ou le triple du montant au contrat que je signerais. Donc, je ne négocie plus rien ! Je m’assure par contre de livrer la marchandise sur la scène. Mes plus grandes qualités sont mes connaissances et mes expériences. »
À travers tout ça, elle ne perd jamais son objectif principal : jouer et gagner des tournois. C’est ce qui la fait vibrer. Elle revient justement des Jeux mondiaux de sports électroniques (WESG) qui avaient lieu à Hainan, une île au sud de la Chine. Elle y représentait le Canada avec quatre coéquipières, dont la Québécoise Catherine Leroux. Elles ont terminé au troisième rang. Harvey rentre au Québec avec une bonne nouvelle, puisque son équipe représentera dorénavant Spacestation Gaming.
CONTRE VENTS ET MARÉES
« Missharvey » n’a jamais oublié ses racines québécoises. Passionnée par les sports électroniques depuis son enfance, elle a suivi les traces de Guillaume « Grrrr… » Patry, qui a connu un succès reten- tissant à Starcraft au tournant des années 2000. Celui-ci a toutefois fait sa fortune durant sa carrière en Asie, sans rentrer au bercail. Il s’est ensuite établi en Corée du Sud.
Elle estime que l’animateur Denis Talbot a également joué un important rôle dans le domaine des sports électroniques.
« Je suis loin d’être la pionnière, car il y a eu deux super stars avant que j’arrive dans l’arène. Denis et Guillaume sont énormes et occupent chacun une place différente. Pour ma part, j’ai brisé les barrières des médias traditionnels. Les gens me reconnaissent. »
« Stéphanie s’est battue contre vents et marées. Elle a réussi à faire connaître davantage les e-sports dès qu’elle a commencé à gagner. On pouvait mettre un visage sur la discipline, soutient Denis Talbot. Elle a une belle gueule, elle est intelligente, pleine de détermination et d’idées. Elle a développé son expertise en grandissant dans son domaine. Elle serait folle de ne pas s’en servir. »
Avec son expérience et son pouvoir de persuasion, elle a justement motivé quatre filles à l’accompagner dans sa nouvelle aventure au fil de la dernière année. Sans commanditaire et revenus majeurs, l’équipe a redoublé d’ardeur et n’a jamais lâché en entretenant l’espoir.
Cette ténacité a porté ses fruits puisqu’elles ont récemment signé le contrat majeur qu’elles attendaient impatiemment. Avec ses nombreux chapeaux, « Missharvey » a encore su se démarquer alors qu’une nouvelle équipe internationale lui a fait confiance.