Couillard veut le contrôle des centres d’injection
Ottawa jouerait dans les plates-bandes de Québec
Le gouvernement Couillard veut décider seul des critères nécessaires à la mise sur pied des services d’injection supervisée (SIS), une requête qu’ottawa a toutefois choisi d’ignorer.
En mai dernier, quatre ministres du gouvernement Couillard ont écrit à Jane Philpott, alors ministre fédérale de la Santé. Dans cette lettre, que l’agence QMI a obtenue grâce à la loi d’accès à l’information, Québec demande au gouvernement Trudeau « d’envisager de déléguer aux provinces le pouvoir de déterminer les critères » nécessaires à l’implantation d’un SIS.
Ottawa n’a cependant jamais donné suite à la requête de Québec, a confirmé le cabinet de la ministre déléguée à la Santé publique, Lucie Charlebois.
Québec juge que quatre des cinq critères utilisés par Ottawa pour accorder le permis d’un SIS viennent « chevaucher les responsabilités du gouvernement du Québec dans l’organisation des services de santé ».
« TROP EXIGEANTS »
L’autre critère, soit celui de l’impact éventuel qu’aurait un SIS sur la criminalité, n’est « pas pertinent », selon Québec, puisqu’il « est reconnu, d’après les expériences menées ailleurs dans le monde, que les [SIS] n’ont aucun impact sur la criminalité ».
Le gouvernement Couillard juge d’ailleurs que ces cinq critères sont « trop exigeants pour le milieu », ce qui va « à l’encontre de l’objectif » d’assurer la sécurité des consommateurs de drogues.
JUGEMENT
Pourtant, les cinq critères utilisés présentement par Santé Canada sont inspirés d’un jugement de la Cour suprême du Canada, rendu en septembre 2011.
Le plus haut tribunal du pays avait alors reconnu le droit à un SIS de Vancouver de poursuivre ses activités. Du même coup, il avait institué cinq critères que le gouvernement fédéral doit prendre en compte avant de délivrer une exemption à un SIS.
Ce sont ces critères que la Chambre des communes a utilisés lorsque la Loi réglementant certaines drogues et autres substances a été modifiée en mai 2017, faisant passer leur nombre de 26 à cinq. Les 26 critères avaient préalablement été établis sous le gouvernement de Stephen Harper.
EXEMPTION
Le CIUSSS du Centre-sud-de-l’île-de-Montréal, qui a sur son territoire quatre SIS, croit d’ailleurs que d’obtenir une exemption de Santé Canada est beaucoup plus facile aujourd’hui que sous le gouvernement Harper.
« Plusieurs facteurs ont contribué à faciliter l’implantation des services d’injection supervisée, dont le changement du cadre légal et l’annonce par la ministre fédérale de la Santé de l’urgence liée à la crise des opioïdes au Canada », a expliqué Justin Meloche, porte-parole au CIUSSS.
Pour leur part, les ministres Gaétan Barrette et Lucie Charlebois n’étaient pas disponibles pour commenter leur propre demande.