Les faits, juste les faits
Dans sa chronique de samedi, Mario Dumont affirme que lors d’une entrevue que j’ai accordée à Radio-canada, j’ai eu tort d’affirmer que François Legault se trompait en disant que le Québec reçoit d’importants montants de péréquation parce que la santé économique de la province est mal en point. M. Dumont soutient, d’autre part, que mes propos seraient peu crédibles, puisque je suis un économiste « très associé aux mouvements de gauche » et que mon point de vue serait « minoritaire parmi les économistes ». Or, tout ceci est faux.
Si les provinces recevaient des paiements de péréquation parce que leur économie est mal en point, alors ça n’est pas le Québec qui devrait en recevoir le plus ! Notre économie a connu l’an dernier la 2e plus forte croissance au pays, après l’alberta, et son taux de chômage est l’un des plus bas au pays présentement. À l’inverse, Terre-neuve ne reçoit pas un sou de péréquation, mais a connu la pire performance économique au pays, avec un taux de croissance négatif pour 2017 (-1,8 %) et a le plus haut taux de chômage de toutes les provinces, à 14,8 %.
La péréquation n’est donc pas liée à la performance économique, mais bien à la capacité des gouvernements provinciaux à lever des impôts. Il ne s’agit pas ici d’un point de vue, mais de fait, de la formule mathématique de la péréquation et de son principe enchâssé dans la Constitution canadienne. De plus, n’oublions pas que les Québécois payent des impôts à Ottawa, sommes qui leur sont en partie retournées par la péréquation.
De plus, non seulement il ne s’agit pas d’une opinion mais cette explication rationnelle, basée sur les données colligées par Statistique Canada, n’est pas « minoritaire », et n’a aucun lien avec ma philosophie politique de gauche. M. Dumont pourrait aisément retrouver sur le web des textes de spécialistes qui expliquent exactement la même chose que moi : Pierre Fortin, professeur émérite à L’UQAM, Luc Godbout, de l’université de Sherbrooke ou encore Trevor Tombe, de l’université de Calgary. Deux économistes et un fiscaliste qu’on peut difficilement positionner à gauche sur l’échiquier politique.
La péréquation est un concept mal compris et fait l’objet de querelles souvent stériles, au Québec comme ailleurs au pays. Tordre le cou à la réalité comme le font MM. Dumont et Legault dessert largement le débat public.