Le tueur Bissonnette a agi de sang-froid, selon une victime
Saïd El-amari a raconté son cauchemar au juge Huot
Alexandre Bissonnette, le tueur de la mosquée de Québec, agissait de sang-froid comme s’il jouait à un jeu vidéo, selon l’une de ses victimes qui a passé un mois dans le coma après avoir été atteinte par ses balles.
C’est en retenant difficilement ses larmes que Saïd El-amari s’est adressé au juge François Huot lors de la suite des représentations sur la peine de Bissonnette, où les survivants et les veuves des hommes abattus sont venus raconter le cauchemar dans lequel ils ont été plongés.
« Ce soir-là, une fois la prière terminée, j’ai fraternisé avec Azzedine [Soufiane] qui était là… On marchait tranquillement, on parlait… D’ailleurs, je pense que la dernière personne à qui il a parlé, c’est moi… », a-t-il raconté.
Si Saïd El-amari ne se rappelle pas ces longues semaines passées en milieu hospitalier, il se souvient très bien des quelques minutes où un homme est entré dans son lieu de culte pour y assouvir sa folie meurtrière.
En panique, il dit s’être retrouvé près du Mihrab… En se retournant, il a vu Azzedine tomber sous les balles.
« Il y a toujours ce remords qui me ronge toujours… On aurait dû aller lui donner un coup de main pour désarmer le meur- trier… Je demande pardon à sa femme… On n’a pas pu l’aider… », a-t-il dit en éclatant en sanglots.
« Je suis terrifié de savoir qu’une personne aussi tordue puisse se retrouver dans la même société que moi dans vingtcinq ans », a-t-il aussi laissé tomber.
PRESSENTIR LA MORT
La veuve d’abdelkrim Hassane, Louiza, a également pris la parole, forte et fragile à la fois.
« Le 29 janvier, mon mari a regardé une vidéo avec nos filles âgées de 10, 9 et 2 ans et demi montrant un enfant courageux, et il a dit aux filles : “Je veux que vous soyez courageuses comme ce petit garçon”. On aurait dit qu’il avait pressenti sa mort », a-t-elle dit difficilement.
Lorsqu’elle a appris le décès de son conjoint des dix-huit dernières années, elle a eu l’impression de plonger dans un cauchemar.
« Je suis retournée à la maison, ne croyant pas que mon mari était mort. Croyez-moi, rien n’est plus difficile que d’annoncer à de petites filles la mort de leur papa », a-t-elle ajouté.
« Mon mari ne sera plus là pour partager les joies et les peines de ses trois filles. Ma dernière n’aura aucun souvenir de son papa et cela est tellement injuste… », a-t-elle laissé tomber, ébranlée, avant de demander au juge d’imposer au tueur « une peine exemplaire ».
« Ce soir-là, il y a quelque chose qui a été brisé et qui ne se réparera jamais. Qu’est-ce qu’on a fait de mal à la société pour mériter cela ? C’est la question que je me pose tous les jours. » - Mohamed Khabar, touché à deux occasions le soir du drame