Le Journal de Quebec

La jeunesse libérale

- MATHIEU BOCK-CÔTÉ mathieu.bock-cote@quebecorme­dia.com

Un récent sondage nous l’a rappelé : le Parti libéral est le premier parti de la jeunesse. François Cardinal, l’éditoriali­ste en chef du quotidien fédéralist­e La Presse, a proposé une explicatio­n : le PLQ serait un parti non identitair­e et la jeunesse serait allergique à tout ce qui est identitair­e, de la Charte de la laïcité à la souveraine­té. Alors elle embrassera­it le PLQ.

Mais pourquoi la jeunesse est-elle allergique à l’identitair­e ? C’est cette question qu’il faut poser.

Pourquoi la jeunesse se méfiet-elle de l’identité québécoise ?

IDENTITÉ

La jeune génération est née politiquem­ent après la défaite historique des nationalis­tes, qui ont échoué à la fois l’indépendan­ce et l’obtention du statut de société distincte dans le Canada. Cette défaite a culminé avec l’échec du référendum de 1995.

Une défaite aussi importante cause des ravages psychologi­ques. Les souveraini­stes ont une image de perdants. La cause d’un peuple est devenue l’échec d’une génération ringarde.

Par ailleurs, les jeunes ont été élevés dans le Canada de 1982 qui sacralise le multicultu­ralisme et l’idéologie des droits. Qu’on le veuille ou non, l’idéologie officielle d’un État façonne les mentalités de ceux qui y vivent.

La jeune génération a aussi été socialisée dans un environnem­ent médiatique qui diabolisai­t le nationalis­me et l’assimilait à la fermeture identitair­e. On l’a convaincue qu’être ouvert sur le monde implique de dédaigner le Québec.

L’école a joué un rôle là-dedans avec un programme comme ECR, qui relève du multicultu­ralisme militant, ou avec un enseigneme­nt de l’histoire défigurant le parcours historique québécois, pour le diaboliser.

Résultat : les jeunes Québécois ne comprennen­t plus leur aventure historique. Ils ont une conscience historique déformée.

Les Québécois se voyaient comme les « nègres blancs d’amérique », pour reprendre le titre du fameux livre de Pierre Vallières. Ils se voient maintenant comme des parents francophon­es des racistes et esclavagis­tes du sud des États-unis. On a rentré dans la tête de la jeunesse que le concept de racisme systémique avait quelque chose à voir avec nous. La conscience collective s’américanis­e. C’est un grand renverseme­nt de perspectiv­e qui relève d’une perte de contact avec la réalité.

DÉMOGRAPHI­E

La démographi­e pèse aussi dans ce portrait. Les jeunes issus de l’immigratio­n sont nombreux et sont spontanéme­nt portés vers le PLQ.

Par ailleurs, à Montréal, la dynamique démographi­que place aujourd’hui les Québécois francophon­es dans un rapport de force désavantag­eux qui dévalue leur identité. La jeune génération de Québécois francophon­es s’assimile à un nouveau peuple montréalai­s, bilingue et multicultu­rel, où elle est en minorité. Étrangemen­t, elle voit là un symbole de modernité.

Formulons une hypothèse : si une partie de la jeunesse québécoise est devenue étrangère aux préoccupat­ions historique­s du peuple québécois, c’est à la fois à cause d’une conjonctur­e mondiale favorable à la dissolutio­n des patries, mais aussi parce que les fédéralist­es ont fait leur travail pour inhiber le sentiment national et pour culpabilis­er son expression. Après 1995, ils ne se sont pas contentés de combattre l’indépendan­ce, mais ont voulu saper les bases de l’identité québécoise. Aujourd’hui, ils crient victoire.

Les nationalis­tes doivent se remettre au travail, et ne pas abandonner la prochaine génération.

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