Le Journal de Quebec

La plus improbable initiative de paix

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La diplomatie à la Donald Trump, c’est comme tout le reste dans cette Maison-blanche : à la vacomme-je-te-pousse et selon les états d’âme et les coups de gueule du président. Le résultat habituel : un immense chaos et des pots à constammen­t recoller. Pourtant, dans le cas de la Corée du Nord, il risque bien de gagner son pari.

Ceux et celles qui croient que la politique étrangère de la première puissance militaire au monde est un paquebot insubmersi­ble qui vogue avec confiance vers un objectif clair doivent revoir leurs repères maritimes. En 24 heures, la barque a pris l’eau deux fois plutôt qu’une.

Commençons par la Russie. Toutes les agences de renseignem­ent de l’état américain ont conclu que des Russes, guidés par le Kremlin, ont semé la pagaille dans la dernière élection présidenti­elle. Vladimir Poutine était dans le coup.

Comme c’est lui qui a ordonné l’invasion de la Crimée et le soutien aux rebelles russes en Ukraine et qui a fait le choix de s’engager à fond derrière le président syrien Bachar al-assad, un bourreau mondialeme­nt reconnu, qui devra un jour répondre de crimes contre l’humanité, si le concept de justice a le moindremen­t de sens.

ASSEZ, C’EST ASSEZ !

L’ambassadri­ce américaine à L’ONU, Nikki Haley, est ouvertemen­t dégoûtée. Poussant pour toujours plus de sanctions contre Moscou, elle avait gagné son point. C’est ce qu’elle croyait, en tout cas, en annonçant une flopée de nouvelles sanctions pour lundi matin.

« No way ! », a rétorqué Donald Trump, son patron, qui trouve qu’on en fait déjà trop contre les Russes et qui, selon l’ex-directeur du FBI James Comey, refuse, même en privé, de critiquer Vladimir Poutine.

Non seulement Nikki Haley a dû ravaler ses paroles, mais le nouveau conseiller économique du président, Larry Kudlow, a avancé qu’elle était confuse en évoquant de nouvelles sanctions. Elle est en beau fusil, mais ne devrait pas le prendre personnel : c’est toute la politique étrangère américaine qui est plongée dans la confusion.

« DÉTRUIRE LA CORÉE DU NORD », UNE BLAGUE !

Kim Jong-un est un de ces « bad dudes », comme il l’a appelé, que Donald Trump ne s’est jamais gêné d’insulter : « little rocket man », « madman », « short and fat », ça n’a jamais volé très haut. Sauf que le président américain semble avoir vu une lueur au bout du tunnel nucléaire nord-coréen et il a changé de ton. Du tout au tout ! Après avoir pris tous les alliés des États-unis par surprise en annonçant une rencontre prochaine avec le jeune Kim, Donald Trump pèse maintenant sur l’accélérate­ur.

Hier, avec le premier ministre japonais Shinzo Abe qu’il reçoit à Mar-aLogo, sa grande propriété floridienn­e, il a d’abord fait référence à des « discussion­s directes à très haut niveau » avec Pyongyang avant de répondre « Oui ! », en soirée, à un journalist­e qui lui demandait s’il avait parlé à Kim Jong-un.

Pas du tout, a dû corriger la Maison-blanche, alors que le Washington Post précisait que c’est le directeur du FBI, Mike Pompeo, qui se serait rendu là-bas. Confusion quand tu nous tiens !

Reste que les choses bougent, et vite, dans le dossier nord-coréen. Et parmi les commentate­urs conservate­urs aux États-unis, tel James S. Robbins du USA Today, on commence à évoquer un aboutissem­ent quasi rocamboles­que : s’il réussit à faire entendre raison à Pyongyang et à lui faire abandonner son arsenal nucléaire, il pourrait se retrouver en lice pour le Nobel de la paix. Trump… Nobel… imaginez.

C’est toute la politique étrangère américaine qui est plongée dans la confusion.

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PHOTO AFP Alors qu’il recevait le premier ministre japonais Shinzo à Mar-a-logo, Donald Trump a évoqué la tenue de discussion­s « à très haut niveau » avec Pyongyang.

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