Le Journal de Quebec

L’investisse­ment des Québécois pique du nez

L’argent des Québécois dans l’avion a perdu les deux tiers de sa valeur

- Sylvain Larocque llarocques­yl

Alors qu’airbus s’apprête à prendre le contrôle de la C Series de Bombardier pour 0 $, les états financiers de la multinatio­nale québécoise révèlent que la valeur comptable de l’investisse­ment des Québécois dans le programme a plongé de 900 millions $ CA.

En 2016, Québec a injecté 1 G$ US (1,3 G$ CA) dans la Société en commandite Avions C Series. À la fin de 2017, le placement ne valait plus que 598 M$ US, soit 770 M$ CA. Et il ne vaudra plus que 307 M$ US (395 M$ CA) à la fin mai, lorsqu’airbus aura officielle­ment monté à bord. En dollars canadiens, la perte sur papier se chiffre donc à plus de 900 M$.

LA VALEUR AURAIT PU DOUBLER

Pour en arriver à ces chiffres, nous avons soustrait les passifs de la C Series de ses actifs, qui sont indiqués dans le rapport annuel 2017 de Bombardier. Nous obtenons un actif net de 1,62 G$ que nous répartis- sons ensuite en fonction des pourcentag­es de détention de Bombardier et du gouverneme­nt.

Soulignons que si Québec avait investi 1 G$ US directemen­t dans Bombardier plutôt que dans la C Series, comme le souhaitaie­nt les partis d’opposition, la valeur du placement du gouverneme­nt aurait presque doublé pour atteindre 1,86 G$ US, soit 2,39 G$ CA. En dollars canadiens, le gain dépasserai­t 1 G$.

En 2016, Québec possédait une participat­ion de 49,5 % dans la C Series, mais celle-ci a fondu à 37 % à la fin de 2017 en raison des 683 M$ US injectés par Bombardier dans le programme au cours des derniers mois. La participat­ion de Québec sera réduite à 19 % lorsqu’airbus prendra le contrôle de la C Series, le mois prochain.

MÉTHODE RECONNUE

Rappelons qu’airbus n’aura rien à débourser pour acquérir 50,01 % du programme. En revanche, le géant européen mettra à contributi­on ses équipes de vente, de gestion des achats et de service à la clientèle au profit de la C Series. Il devra aussi aider Bombardier à combler les futures pertes financière­s du programme, qui est toujours déficitair­e.

Daphné Drouin, professeur­e de sciences comptables à l’université du Québec à Trois-rivières, confirme que la méthode de l’actif net est l’une de celles qui sont reconnues pour évaluer une entreprise.

« Actifs moins passifs, c’est une façon de voir les choses, mais il y a beaucoup plus que ce qui apparaît dans le bilan financier, tient-elle toutefois à préciser. Les investisse­urs misent sur le potentiel d’amener l’entreprise ailleurs sur une certaine période. »

De plus, note Mme Drouin, le gouverneme­nt avait des motifs autres que strictemen­t financiers pour investir dans la C Series, qui joue un rôle structuran­t dans l’industrie aéronautiq­ue québécoise.

« Les montants que vous présentez ne prennent pas en considérat­ion les flux monétaires générés par les ventes d’appareils et ne constituen­t donc pas la valeur marchande de notre placement », a-t-on réagi au cabinet de la ministre de l’économie, Dominique Anglade.

Le gouverneme­nt doit publier en juin une évaluation indépendan­te de son investisse­ment dans la C Series en date du 31 mars.

« Nous sommes confiants quant à la valeur de notre placement qui devrait être maintenue à 1 milliard $ US », a-t-on soutenu chez Mme Anglade.

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 ?? PHOTO D’ARCHIVES, JOËL LEMAY ?? Le président et chef de la direction de Bombardier Alain Bellemare a accueilli Thomas Enders, le PDG d’airbus, et le premier ministre Philippe Couillard dans les installati­ons de l’avionneur, à Mirabel, l’automne dernier.
PHOTO D’ARCHIVES, JOËL LEMAY Le président et chef de la direction de Bombardier Alain Bellemare a accueilli Thomas Enders, le PDG d’airbus, et le premier ministre Philippe Couillard dans les installati­ons de l’avionneur, à Mirabel, l’automne dernier.
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