Vasectomies à gros prix
Béchir Hage, qu’on voit ici au volant d’une Ferrari, est l’un des médecins accusés.
Huit médecins spécialistes d’une clinique de Laval sont accusés d’avoir exigé des frais déraisonnables à des patients. Ils leur facturaient 300 $ pour des médicaments qui ne valaient qu’une fraction de ce prix, en plus de se faire payer pour l’intervention par la Régie de l’assurance maladie.
C’est la première fois que des urologues se retrouvent devant le comité de discipline du Collège des médecins pour faire face à ce genre d’infraction. Ils comparaîtront à partir de lundi prochain.
La cause risque de faire jurisprudence puisque plusieurs autres spécialistes ont réclamé de tels frais pour des vasec- tomies, en plus des honoraires qui leur étaient versés par la Régie de l’assurance maladie.
Ce genre de frais, appelé frais accessoires, est interdit par la loi depuis janvier 2017.
À chaque vasectomie, les huit médecins de la clinique Uro-laval faisaient payer 150 $ au patient pour un agent anesthésiant, la Xylocaïne.
En pharmacie, chaque fiole de ce médicament coûte 10,59 $ et contient une quantité suffisante pour plusieurs patients, selon nos informations.
Un autre produit, soit un désinfectant appelé chlorexidrine, était également facturé 150 $ à chaque patient. En pharmacie, la chlorexidrine se vend 4,99 $ pour une dose de 115 ml suffisante pour plusieurs interventions.
PATIENT EXCÉDÉ
Un père de trois enfants qui était furieux d’avoir payé un tel prix est à l’origine de la plainte au Collège des médecins. « Comme contribuable, on paie déjà pour les médecins, on n’a pas à repayer en plus », dit Alexandre Marcoux.
« J’imagine que c’était une façon de faire de l’argent rapidement. Chaque opération prenait 15 ou 20 minutes », ajoute-t-il.
M. Marcoux a contacté notre Bureau d’enquête après avoir lu un reportage sur un ophtalmologiste condamné à une amende pour avoir facturé 30 $ à des patients pour des gouttes qui valaient entre 75 ¢ et 3,84 $.
PRATIQUE GÉNÉRALISÉE
Alexandre Marcoux dit avoir été adressé à la clinique Uro-laval par son médecin de famille. L’urologue Mathieu Bettez lui aurait alors offert de payer 300 $ pour être opéré à la clinique la semaine suivante ou d’attendre plus d’un an pour une intervention à l’hôpital sans frais. « J’avais pas vraiment le choix si je voulais pas être pris pour attendre deux ans pour le faire », dit-il.
Une première enquête du Collège a don- né raison à Alexandre Marcoux contre le médecin qui l’avait opéré, et la clinique s’était engagée à suspendre temporairement les vasectomies effectuées en cabinet.
Or, après un appel à la clinique, M. Marcoux s’est rendu compte qu’ils facturaient toujours pour les vasectomies et que les frais étaient maintenant de 375 $. De plus, la pratique semblait généralisée à l’ensemble des médecins.
L’enquête a par la suite été élargie à l’ensemble des médecins de la clinique, qui se retrouvent tous aujourd’hui devant le Conseil de discipline.
Un des médecins accusés, Steven P. Lapointe, est même le président de l’association des urologues du Québec.