Du front tout le tour de la tête
Agir à la Donald Trump, c’est avoir du front à revendre. Il faut une sérieuse dose d’insolence pour affirmer, comme il l’a fait lundi via Twitter, que la « Maison-blanche fonctionne en douceur » et qu’on y retrouve « une grande énergie et une endurance inépuisables ».
Il est pourtant en guerre avec son ministre de la Justice, vient de perdre son candidat au ministère des Anciens Combattants, risque de voir partir le responsable de l’agence de protection de l’environnement et se démène à démentir que son chef de cabinet fait référence à lui en le traitant d’idiot. On repassera pour la douceur.
Il y a tout de même des cas où son effronterie lui rapporte. En se comportant comme s’il était son propre secrétaire d’état, conseiller à la Sécurité nationale et directeur des communications, il a pu, d’un coup de tête, approuver la tenue d’une rencontre avec Kim Jong-un.
Ce que pratiquement tous les experts ont accueilli avec dérision s’annonce pour être le face-à-face le plus spectaculaire depuis celui de Richard Nixon et de Mao Zedong en 1972. Attendez-vous, s’il en sort quoi que ce soit de positif, à ce que les murmures de Nobel de la paix, tels que répandus par le président sud-coréen en début de semaine, soient exprimés de plus en plus bruyamment dans les semaines et les mois à venir !
Attendez-vous à ce que les murmures de Nobel de la paix [...] soient exprimés de plus en plus bruyamment dans les semaines et les mois à venir !
LES ISLAMISTES, PRESQUE RÉGLÉS
Il faut aussi mettre dans la colonne de ses succès l’annonce, lundi, par le Pentagone de la fin des principales opérations de combat contre l’état islamique et le démantèlement du commandement des troupes américaines en Irak. Ces troupes formaient et encadraient les soldats irakiens dans leur campagne contre les islamistes au cours des trois dernières années.
Même si, ici et là, les extrémistes de l’état islamique se font encore voir et entendre, la menace ne ressemble en rien à celle d’il y a quelques années, alors que l’expansion de leur « califat » apparaissait irrésistible.
Cela dit, même si Trump souhaite rapatrier les « boys » le plus vite possible, le secrétaire à la Défense – un des rares membres du cabinet à toujours avoir le respect du président – tient à éviter l’erreur commise après la chute de Saddam Hussein, alors que le retrait des soldats américains avait favorisé le développement des djihadistes de l’état islamique.
James Mattis juge que les troupes américaines ont toujours un rôle à jouer dans la stabilisation de la région, si ce n’est que d’aller donner un coup de main aux soldats postés en Afghanistan.
SI C’EST PAS ICI, C’EST LÀ
Franchement impossible là-bas de crier victoire : le double attentat de lundi à Kaboul, qui a fait 26 morts, dont neuf journalistes, n’était qu’un de plus dans une série qui n’en finit pas. À peine une semaine plus tôt, soixante personnes (!) avaient été tuées, alors qu’elles attendaient, au centre de la capitale, pour s’inscrire sur les listes électorales.
Les zélés de l’état islamique, chassés de Syrie et d’irak, parallèlement aux increvables talibans, sèment la terreur en Afghanistan, au moment où on apprend que les membres des forces afghanes – que les Américains encadrent là aussi – ont chuté de 11 % en un an. Devant l’horreur islamiste, le recrutement se fait péniblement.
Et c’est sans parler de l’iran qui pourrait bien dégénérer en crise majeure si, tel qu’on le craint, Trump déchire l’accord sur le programme nucléaire iranien signé par Barack Obama. Bref, à regarder autour, il y a des fronts… militaires, plus complexes et plus larges que celui de Donald Trump. Ce n’est pas rien.