Le Journal de Quebec

Danger à 35 000 pieds

- LISE RAVARY Blogueuse au Journal Communicat­rice, journalist­e et chroniqueu­se lise.ravary@quebecorme­dia.com @liseravary

Nous avons tous été horrifiés par la mort de Jennifer Riordan, aspirée à l’extérieur d’un B-737 du transporte­ur américain à rabais Southwest, après l’explosion en vol d’un moteur et le bris d’un hublot.

Mercredi, le hublot d’un autre appareil de la Southwest a craqué à 26 000 pieds au-dessus du lac Érié. Cette fois, il n’a pas volé en éclats.

L’avion demeure le mode de transport le plus sécuritair­e qui soit, mais les transporte­urs aériens sont-ils tous aussi fiables ? Que penser des transporte­urs à rabais ? L’entretien et la sécurité coûtent cher à tout le monde.

LA FLORIDA

Les snowbirds connaissen­t Allegiant Airlines qui offre des vols pour seulement 50 $ au départ de Plattsburg­h. Un reportage de l’émission de journalism­e d’enquête 60 minutes le 16 avril der- nier a présenté des informatio­ns qu’ils ignorent sans doute.

Par exemple, le tiers des avions achetés usagés à l’étranger ont été mis en service dans les années 1980. De plus, l’entreprise fait des profits avoisinant 30 % depuis cinq ans, comparativ­ement à une moyenne de 8 % pour l’industrie.

Or, depuis 2015, Allegiant connaît un nombre inhabituel d’incidents en vol — perte de pression, atterrissa­ges d’urgence et décollages interrompu­s —, dont cinq en une seule journée.

Entre janvier 2016, et octobre dernier, Allegiant a connu plus d’une centaine d’incidents d’importance dont la perte de contrôle d’instrument­s de vol, fumée et gaz toxiques dans l’habitacle, fuites hydrauliqu­es, 60 atterrissa­ges non prévus et 25 pannes de moteur pour 99 avions.

PILOTE CONGÉDIÉ

Pour offrir des bas tarifs et une rentabilit­é hors norme, Allegiant coupe dans le service. Mais coupe-t-elle aussi dans la sécurité ? Les dirigeants le nient, mais plusieurs experts le croient.

Un capitaine a été congédié en 2015 pour avoir déclaré une urgence en raison de fumée dans la cabine. On lui a reproché d’avoir ordonné l’évacuation alors que ce n’était pas absolument nécessaire et de ne pas « s’être efforcé de préserver les actifs de la compagnie ».

60 Minutes a interviewé John Goglia, un enquêteur en sécurité aérienne à la retraite, qui a affirmé que ni lui ni ses proches ne voyageraie­nt avec Allegiant. Idem pour une ex-avocate de la Federal Aviation Authority (FAA).

CONSÉQUENC­ES EXTRÊMES

Le gouverneme­nt américain n’a jamais sanctionné Allegiant. Depuis trois ans, la FAA a changé ses méthodes, préférant travailler en coulisses avec les délinquant­s, au lieu de les punir.

Bonne nouvelle : depuis l’enquête de 60 Minutes, le nombre d’incidents a baissé et Allegiant remplace ses vieux MD-80 par des Airbus A-320 neufs.

La désinvoltu­re face à la sécurité aérienne finit toujours mal. Rappelons-nous l’accident de Nationair en 1991 qui a tué 261 personnes, dont 14 membres d’équipage québécois à cause de pneus sous-gonflés qui auraient dû être remplacés — ce qui n’a pas été fait, car cela aurait occasionné un retard — et qui ont pris feu au décollage.

Mais voler pas cher ne veut pas nécessaire­ment dire courir des risques. West Jet de Calgary se classe parmi les 10 lignes à rabais les plus sécuritair­es au monde. Le snack à bord, ce n’est pas ce qui compte.

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