Lapresse se fait larguer
L’éditeur de Lapresse, Guy Crevier, et André Desmarais, président et co-chef de la direction de Power Corporation, à leur arrivée au Palais des Congrès, où ils ont annoncé la nouvelle aux employés.
« [AVEC UNE NOUVELLE STRUCTURE DU TYPE À BUT NON LUCRATIF], ÇA IMPLIQUE UNE PLUS GRANDE TRANSPARENCE DES FINANCES » – Charles Côté, président syndical
Les employés de La Presse se retrouvent avec plus de questions que de réponses au lendemain de l’annonce de Power Corporation qui a décidé de larguer le quotidien pour en faire un organisme à but non lucratif.
« On quitte un grand groupe aux poches profondes […] Quand même, il y a cette inquiétude de voir le sort financier de La Presse au sein d’une structure qui devra s’autofinancer », a confié le journaliste Karim Benessaieh.
Les quelque 500 employés de La Presse avaient été convoqués à une rencontre mystère, hier matin. Le grand patron de Power Corp, André Desmarais, dont l’entreprise est propriétaire de La Presse depuis 50 ans, a annoncé son intention de se départir du journal.
« Au début, nous étions figés par la nouvelle, c’est un gros changement […], mais après le choc initial, on y voit plutôt les avantages et le potentiel », a dit M. Benessaieh après la rencontre.
« Il reste l’inquiétude reliée à l’inconnu », a-t-il cependant ajouté.
Sur les réseaux sociaux, plusieurs employés se sont montrés favorables au changement annoncé.
La multinationale a spécifié qu’elle donnerait 50 millions $ à La Presse pour qu’elle devienne un organisme à but non lucratif (OBNL). Les patrons ont précisé qu’aucune mise à pied n’était prévue.
« Tout profit éventuellement généré par les opérations, toute aide gouvernementale, tout argent recueilli auprès de donateurs seront ainsi consacrés aux opérations », a écrit le président du média dans un texte publié en ligne.
Le syndicat des employés de La Presse s’est dit favorable à voir le quotidien devenir un OBNL, tant que les emplois et l’indépendance des journalistes sont conservés.
TRANSPARENCE
« Ça soulève de nombreuses questions et nous aurons à en parler à l’employeur », s’est contenté de répéter le président syndical, Charles Côté.
Une fiducie d’utilité sociale comme entend créer Power Corp « implique une plus grande transparence des finances », selon le syndicat, qui réclame une place au sein du conseil d’administration de la nouvelle entité.
« On en est pas là », a répondu M. Côté, à savoir si le syndicat pourrait devenir un donateur de La Presse. Il a toutefois rappelé que les employés sont en négociations pour renouveler la convention collective depuis maintenant plus de deux ans.
« Quand ça vient avec un chèque de 50 M$, ce n’est pas un abandon [de Power Corp] », croit-il cependant.
En faisant de La Presse un OBNL, ses patrons espèrent convaincre les gouvernements de leur verser une aide financière ou encore demander des dons aux lecteurs, par exemple.
Reste à voir comment les journalistes pourront conserver leur indépendance dans un tel contexte.