Le Journal de Quebec

12 500 migrants ont déjà reçu leur permis de travail

Les demandeurs d’asile ont toutefois de la difficulté à trouver des emplois stables

- CAMILLE GARNIER

Près de 12 500 demandeurs d’asile irrégulier­s ont reçu leur permis de travail depuis mai 2017 au Québec, alors que le délai de délivrance est passé de trois mois à 22 jours.

Ottawa indique avoir réduit considérab­lement le temps d’attente pour les permis de travail, à la suite d’une requête du gouverneme­nt du Québec pour éviter que les demandeurs d’asile dépendent trop longtemps de l’aide sociale.

Beaucoup de ces migrants sont pressés de trouver un emploi afin de gagner leur vie sans avoir recours aux chèques du gouverneme­nt.

« Ceux que je vois se sentent mal de recevoir l’aide sociale, affirme Zineb El Alami, conseillèr­e en emploi de l’organisme Impulsion-travail, basé à Montréal-nord. Ils voient cela comme quelque chose de presque insultant. »

PETITS CONTRATS

Bien que de nombreuses offres soient disponible­s en région, les demandeurs d’asile de Montréal peinent toujours à obtenir autre chose que de courts contrats via des agences de placement.

« Parfois, les demandeurs d’asile appellent Revenu Québec pour dire qu’ils ont un emploi, même si ce n’est qu’un contrat de quelques jours, commente Zineb El Alami. C’est problémati­que, car ces personnes vont sortir de l’aide sociale sans avoir encore de revenu fixe. »

Wikine Desina, une mère de famille haïtienne arrivée irrégulièr­ement au Québec l’été dernier, a ainsi enchaîné les petits boulots à Montréal après avoir obtenu son permis de travail en novembre.

« Il y a des jours où je travaillai­s et d’autres pas », explique la trentenair­e qui tenait un commerce dans son pays d’origine.

« ON PEUT DIRE QU’IL EST PLUS FACILE DE TROUVER UN EMPLOI DURABLE EN RÉGION VU L’AMPLEUR DE LA PÉNURIE [DE MAIN D’OEUVRE] » – Nisrin Al Yahya, coordonnat­rice de projets à La Maisonnée

SÉCURITÉ D’EMPLOI

Ces courts contrats, le plus souvent pour des emplois de manutentio­n, nuisent à l’intégratio­n des nouveaux arrivants, explique Nisrin Al Yahya, coordonnat­rice de projets en employabil­ité pour l’organisme montréalai­s La Maisonnée, qui travaille, entre autres, avec des demandeurs d’asile.

« C’est un facteur très important pour les personnes immigrante­s, qu’elles soient demandeuse­s d’asile ou pas, dit-elle. L’emploi, c’est la sécurité, et la sécurité ne vient pas en changeant d’emploi tous les trois mois. »

« À Montréal, le roulement est très important, poursuit Nisrin Al Yahya. On peut dire qu’il est plus facile de trouver un emploi durable en région vu l’ampleur de la pénurie [de main-d’oeuvre]. »

Pour permettre aux nombreux demandeurs d’asile haïtiens arrivés depuis l’été dernier d’accéder à des postes permanents, Impulsion-travail a mis en place en début d’année un programme de formation à la recherche d’emploi.

En cinq semaines, l’organisme introduit des groupes d’une dizaine de personnes aux réalités du marché québécois, en les aidant à rédiger leur C.V. et à préparer un entretien d’embauche.

« Souvent, ces gens ont eu de l’expérience dans leur pays, mais ne savent pas la valoriser, explique Zineb El Alami, qui anime le programme. J’essaie d’identifier avec eux leurs compétence­s et les emplois qu’ils peuvent viser. »

Après avoir suivi cette formation, Wikine Desina a finalement obtenu le mois dernier un poste permanent à Montréal, chez Olymel, une entreprise spécialisé­e dans la transforma­tion de la viande.

« Maintenant, je travaille toute la semaine et je me sens plus stable », assure-t-elle.

Olymel indique avoir recruté environ 200 demandeurs d’asile comme Mme Desina depuis l’été dernier.

En début de semaine, le Parti québécois a annoncé sa volonté d’attirer un immigrant sur quatre en région s’il obtenait la majorité aux prochaines élections provincial­es.

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PHOTO CAMILLE GARNIER Zineb El Alami (à droite), de l’organisme Impulsion-travail, explique que les demandeurs d’asile comme Wikine Desina (à gauche) ont souvent hâte de travailler.

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