Le premier ministre Mariano Rajoy renversé en Espagne
Le socialiste Pedro Sanchez devient le chef du nouveau gouvernement
MADRID | (AFP) Avec l’appui d’une majorité hétéroclite lui promettant un mandat compliqué, le socialiste Pedro Sanchez est devenu hier chef du gouvernement espagnol en poussant vers la sortie le conservateur Mariano Rajoy, coulé par un scandale de corruption.
Promoteur d’une motion de censure déposée au lendemain de l’annonce de la condamnation du Parti Populaire de M. Rajoy dans un mégaprocès pour corruption, M. Sanchez a été investi automatiquement par le Parlement suite au vote de cette motion renversant son rival.
Le décret entérinant sa nomination a été signé hier par le roi Felipe VI, devant lequel il doit prêter serment aujourd’hui à onze heures (9 h GMT).
Lors de sa première prise de parole après le vote, cet ancien professeur d’économie surnommé le « beau mec » a promis d’aborder avec « humilité tous les défis auxquels le pays fait face », en citant en particulier « l’urgence sociale », alors que le chômage et la précarité minent toujours l’espagne malgré l’insolente reprise économique.
À 46 ans, M. Sanchez tient enfin sa revanche, après deux défaites électorales successives qui lui ont valu d’être débarqué de la direction de sa formation en 2016, avant d’être remis en selle par les militants l’année dernière.
UNE MAJORITÉ INSTABLE
Avec l’arrivée au pouvoir du socialiste, une nouvelle page de l’histoire politique espagnole va s’ouvrir. En poste depuis décembre 2011, M. Rajoy, 63 ans, avait survécu à plusieurs crises majeures, de la récession à la tentative de sécession de la Catalogne, en passant par les mois de blocage politique en 2016.
Mais pas au vote d’hier, adopté à une majorité de 180 députés qui a fait du conservateur le premier chef de gouvernement victime d’une motion de censure depuis le rétablissement de la démocratie espagnole.
La grande question qui se pose désormais concerne la capacité de M. Sanchez à gouverner avec une majorité hétéroclite, allant du parti de la gauche radicale Podemos aux indépendantistes catalans et aux nationalistes basques du PNV.
Ses alliés de circonstance ont tous souligné que leur vote contre Rajoy n’était pas un chèque en blanc et Podemos a notamment déjà réclamé d’entrer au gouvernement.
« PORTE DE DERRIÈRE »
M. Sanchez va entrer au gouvernement « par la porte de derrière », a raillé Rafael Hernando, patron des députés conservateurs.
Afin de convaincre le PNV, M. Sanchez avait dû assurer qu’il ne toucherait pas au budget du gouvernement Rajoy, qui prévoit des largesses financières pour le Pays basque. Il a en outre promis aux indépendantistes catalans qu’il essaierait de « jeter des ponts pour dialoguer » avec le gouvernement régional de Quim Torra.
Après six ans au pouvoir, le sort de M. Rajoy s’est joué en à peine une semaine depuis le dépôt vendredi par le PSOE de sa motion de censure, au lendemain de la condamnation du PP pour avoir bénéficié de fonds obtenus illégalement.
L’affaire de trop pour M. Rajoy, dont le parti est empêtré dans plusieurs scandales.