Le Journal de Quebec

UN HOMME DÉCIDÉ

Michel Dallaire, grand patron du Groupe Dallaire, a toujours su où il s’en allait. À 15 ans, il nourrissai­t déjà le rêve de prendre la relève de son père, et il avait aussi rencontré la femme de sa vie.

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Aîné d’une famille de quatre enfants, Michel Dallaire suivait son père sur les chantiers chaque fin de semaine, alors qu’il était encore très jeune. Né dans la ville de Giffard, qui a depuis été rattachée à Beauport, puis à Québec, il bougeait beaucoup.

« Je pense que j’étais trop tannant à la maison et que ça donnait un break à ma mère », lance-t-il en riant, se qualifiant lui-même d’un peu hyperactif.

Son père, Jules, fondateur du Groupe Dallaire et de Cominar, possédait à l’époque plusieurs commerces avec trois de ses frères. Le groupe détenait une entreprise de constructi­on et était propriétai­re et gestionnai­re de plusieurs immeubles, créneau qui a toujours été à la base de ses activités commercial­es. Il a d’ailleurs construit le premier condominiu­m à Québec, dans les années 1970.

À cela s’ajoutaient les épiceries Dallaire, qui ont été vendues plus tard à Métro Richelieu, Déco-meubles qui a depuis été racheté par Meubles Léon, des restaurant­s et des quincaille­ries. Décidément, le fils a de qui tenir ce besoin d’être constammen­t occupé.

UN TOURNANT

Mais c’est le volet constructi­on qui intéressai­t le plus Michel Dallaire, qui a toujours été passionné par les chantiers, où il a passé de nombreux étés à travailler. « Jules me disait toujours que la seule façon d’apprendre à construire était de commencer au pic et à la pelle », se souvient-il, ajoutant que des gens qu’il a côtoyés à l’époque travaillen­t toujours pour lui aujourd’hui.

En troisième secondaire, M. Dallaire savait qu’il voulait suivre une formation d’ingénieur civil, mais pas pour « calculer des poutres et des colonnes toute sa vie ». Après deux ans à travailler dans un bureau d’ingénieur, il est revenu au sein de l’entreprise. Pour son père, c’était important qu’il aille voir ailleurs pour conforter son choix.

Car encore là, très tôt, Michel Dallaire a su qu’il souhaitait prendre la relève. « J’avais 16 ou 17 ans, et mon père avait eu une opportunit­é de vendre l’entreprise. Je lui avais dit à ce moment-là, ça m’intéresse », dit le fils, soulignant à quel point il a toujours été fier de travailler avec son père et ami, parti trop vite en 2006.

Michel Dallaire le décrit comme un homme respectueu­x de son entourage, qui n’était pas du genre à imposer une décision et qui croyait au droit à l’erreur. Il a ensuite tenté d’appliquer cette façon de faire. « Ce qui m’a manqué le plus après son décès, c’était le “qu’est-ce que tu en penses ?” Jamais il ne me disait quoi faire, mais souvent il allait me faire réfléchir dans d’autres directions. Il disait souvent : “Espère le mieux, et planifie pour le pire.” »

Jules Dallaire a été emporté par la maladie des fumeurs, le cancer du pou- mon, mais sans avoir jamais fumé. Même s’il a trouvé cette période extrêmemen­t difficile, et que les larmes lui viennent encore lorsqu’il l’évoque, son fils aîné en parle tout de même comme d’une belle expérience.

Son père a eu la chance de mourir à la maison, entouré des siens, qui l’ont accompagné pendant cette année où il a reçu des traitement­s de chimiothér­apie. Dans les années qui ont suivi, Michel Dallaire a aussi accompagné son beaupère Jean, qui a lui aussi été emporté par le cancer.

PLUS DE LIBERTÉ

À la suite de son départ de Cominar, en février, M. Dallaire entend maintenant profiter plus de la vie et de sa famille, qui a toujours été primordial­e. Il a eu trois enfants qui lui ont donné trois petits-enfants. Coup de chance, ses deux filles demeurent au Complexe Jules-dallaire. « Quand mon petit-fils vient sonner à la porte le dimanche matin, c’est le fun. »

Les soupers de famille où tout le monde cuisine ensemble font partie des moeurs, chez les Dallaire. Ils se déroulent souvent dans les chalets familiaux, que Michel Dallaire a construits avec ses enfants, dans Bellechass­e, d’où ses parents sont originaire­s.

M. Dallaire a travaillé davantage à distance cet hiver, ce qu’il ne pouvait se permettre lorsqu’il dirigeait Cominar. « Quand tu gères une compagnie publique, tu dois gérer les apparences », dit-il, ajoutant que cela impliquait les réunions avec les investisse­urs et la recherche de capitaux.

SÉPARATION AVEC COMINAR

On sent bien que ces aspects, après vingt ans à travailler sept jours sur sept, ne lui manqueront pas. Cette séparation avec l’entreprise fondée par son père, M. Dallaire l’a d’ailleurs vécue comme un deuil. « C’est un peu comme lorsque l’un de tes enfants quitte la maison familiale, compare-t-il. Ou lorsque tu mets en vente la maison où tes enfants ont grandi. »

Néanmoins, le dernier bout de sa carrière, il souhaitait le faire dans le développem­ent de projets avec Groupe Dallaire, car c’est ce qui le passionne vraiment. « J’ai des gens autour de moi qui me disent : “À la fin, on te regardait aller, et quand tu avais une réunion de projet pour le Phare, et que tu revenais, ce n’était plus le même gars.” »

Il ne souhaite plus s’investir dans les opérations comme telles, qu’il remet entre les mains de son équipe, qui compte plusieurs jeunes enthousias­tes à la haute direction. Un peu comme l’a fait son père lorsqu’il lui a passé peu à peu le flambeau. Dans son cas, il n’a pas de relève parmi ses enfants, mais là encore, il applique la philosophi­e de Jules, pour qui l’important, c’était de faire ce que l’on aime vraiment.

 ?? PHOTO JEAN-FRANÇOIS DESGAGNÉS ?? Michel Dallaire ne ferait jamais de politique, en cette ère de réseaux sociaux où les commentair­es les plus désobligea­nts se retrouvent parfois. «Je n’aurais pas la carapace, surtout pas si mes proches en étaient bouleversé­s», dit-il.
PHOTO JEAN-FRANÇOIS DESGAGNÉS Michel Dallaire ne ferait jamais de politique, en cette ère de réseaux sociaux où les commentair­es les plus désobligea­nts se retrouvent parfois. «Je n’aurais pas la carapace, surtout pas si mes proches en étaient bouleversé­s», dit-il.

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