Lafarge tente de gagner du temps
PARIS | (AFP) Lafarge a demandé le renvoi de son interrogatoire prévu aujourd’hui chez les juges d’instruction, qui envisageaient son inculpation dans l’affaire du financement présumé du terrorisme en Syrie, son PDG ayant annoncé récemment sa démission, a-t-on appris hier d’une source proche du dossier.
Le groupe français Lafarge, qui a fusionné avec le Suisse Holcim en 2015, est suspecté d’avoir versé, entre 2011 et 2015, à travers des intermédiaires, plus de 12 millions d’euros (18 M$) au profit de factions armées, dont l’état islamique, pour maintenir l’activité de son usine en Syrie, malgré le conflit qui menaçait celle-ci et ses employés. Ces sommes couvraient notamment le paiement de taxes pour assurer le passage des employés ou des achats de matières premières, dont du pétrole.
Power Corporation du Canada, contrôlé par la famille Desmarais, est un actionnaire indirect du géant du ciment Lafargeholcim, impliqué dans cette nébuleuse affaire. Paul Desmarais Jr, co-chef de la direction de Power, siège au CA de Lafarge depuis 2008.
CONVOCATION CRUCIALE
Réagissant à ce report demandé par Lafarge, Me Marie Dosé, avocate de L’ONG partie civile Sherpa, a dénoncé des « méthodes dilatoires ». « Lafarge est maintenant sans représentant légal dans le seul but de gagner du temps », a-t-elle estimé.
Saad Sebbar, le PDG de Lafarge SA, la société de participation actionnaire à 98 % de la filiale syrienne mise en cause dans l’enquête, devait représenter la société aujourd’hui lors de cette convocation cruciale devant la justice.
La juge d’instruction, Charlotte Bilger, envisageait en effet de mettre en examen cette structure juridique notamment pour « financement d’une entreprise terroriste », « mise en danger délibérée de la vie d’autrui » et « complicité de crimes contre l’humanité », en tant que personne morale.