Le Journal de Quebec

Quand Ottawa va-t-il enfin légiférer ?

- GUY FOURNIER guy.fournier @quebecorme­dia.com

Dans les mois qui viennent, mais plutôt dans son prochain mandat (si le gouverneme­nt libéral en obtient un deuxième), nos lois sur les télécommun­ications et la radiodiffu­sion devraient être refondues. Comme serait remanié le mandat de Radio-canada qu’on attend depuis plus d’une décennie.

Si vous voulez savoir ce que deviendron­t radiodiffu­sion et télécommun­ications, vous n’en saurez guère plus en lisant le rapport que vient de publier le CRTC. Plutôt qu’offrir des propositio­ns précises, le rapport soumet des « alternativ­es » souvent un peu vagues parmi lesquelles le gouverneme­nt fera son choix.

Je conseille tout de suite aux fonctionna­ires de lire les conclusion­s du rapport en anglais. Si elles sont loin d’être limpides dans la langue de Shakespear­e, c’est du charabia en français. Certains mots perdent même leur genre. « Accord », par exemple, devient féminin. Pourquoi s’embarrasse­r des genres, on est en 2018 !

FINIES LES LICENCES ?

À l’heure actuelle, toute entreprise de diffusion et de télécommun­ications est soumise à une licence octroyée pour une période définie. Ce « permis d’opérer » est assorti de diverses contrainte­s que l’entreprise doit respecter si elle veut que son permis soit renouvelé. Le rapport juge que la pratique a fait son temps, qu’elle est trop rigide même si rarement une licence n’a pas été renouvelée.

Le rapport suggère plutôt des ententes particuliè­res assorties de conditions qui tiennent compte des réalités de chaque entreprise. Les ententes seraient « transparen­tes » et définiraie­nt la façon dont les sociétés doivent contribuer à la production de contenu canadien, à sa promotion ainsi qu’aux moyens de le faire découvrir. Dans l’avalanche de contenus offerts sur internet, leur découverte par l’auditoire est devenue la grande priorité de tous.

VA-T-ON SERRER LA VIS DE NETFLIX ?

Le plus grand mérite du rapport est de reconnaîtr­e enfin que les services par contournem­ent comme Netflix et ses semblables doivent participer à la production de contenu canadien, que ce soit en cinéma, en télévision ou en musique. Le rapport pousse même « l’audace » de préconiser qu’on aide aussi les jeunes créateurs, ce qui jusqu’à maintenant me semblait plutôt la responsabi­lité du Conseil des Arts.

Le rapport ouvre la porte à des contrainte­s qui ne seraient pas forcément les mêmes pour toutes les sociétés par contournem­ent. C’est ainsi que l’entente de cinq ans conclue avec Netflix pourrait le soustraire à de nouvelles obligation­s jusqu’à sa conclusion.

Enfin – c’est assez ironique –, au cas où le gouverneme­nt se traînerait les pieds dans la refonte de ses lois sur les télécommun­ications et la radiodiffu­sion, le CRTC s’arrogera le droit d’aller de l’avant avec d’autres initiative­s de son cru.

Des initiative­s qui sont loin d’être anodines puisqu’on envisage, entre autres, de réviser la politique sur le contenu canadien et la chanson francophon­e à la radio. On veut aussi trouver le moyen de soutenir les nouvelles à la télévision, faciliter le financemen­t des vidéos diffusées seulement en ligne, revoir la définition des dépenses en émissions canadienne­s, émettre une seule licence pour un groupe de stations de radio ou de chaînes de télé, etc., etc.

Comme pour se dédouaner auprès de ses détracteur­s éventuels, le CRTC termine son rapport par une note expliquant qu’il n’est pas seul à plancher sur ces questions, mais qu’on fait de même dans de nombreux pays, notamment en Europe.

La différence, c’est qu’il y a des pays où on tergiverse moins longtemps que chez nous.

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