Le Journal de Quebec

Trump et les petits lapins

-

Plus je pense à Trump, plus je trouve qu’il ressemble aux guerriers de la justice sociale qui sévissent sur les médias sociaux.

Vous savez, les crinqués de la gauche qui traitent tous ceux qui ne pensent pas comme eux de racistes, de sexistes et de fascistes ?

On dirait les deux faces d’une même pièce.

ÉCRASER L’ADVERSAIRE

À première vue, tout sépare les guerriers de la justice sociale et les trumpistes. Ce sont des adversaire­s, des ennemis jurés. Mais dans le fond, ils se ressemblen­t comme deux gouttes d’eau.

Le président des États-unis et ses fidèles passent leur temps à insulter leurs opposants. Les petits lapins passent leur temps à s’indigner.

Ils se perçoivent tous comme de pauvres victimes. Les trumpistes, de l’establishm­ent politique et médiatique. Et les petits lapins, du capitalism­e patriarcal.

Aucune discussion n’est possible avec eux. C’est la pensée binaire dans tout ce qu’elle a de plus bête et de plus tribal.

On connaît tous la phrase de Leonard Cohen : « Il y a une fissure dans chaque chose, c’est comme ça que la lumière peut entrer. »

Eh bien, avec ces deux groupes, on se retrouve face à une pensée étanche, fermée sur elle-même, qui ne laisse aucune place au débat ou au dialogue.

Ils ne réfléchiss­ent pas : ils insultent. Ils ne discutent pas : ils attaquent et humilient.

Le philosophe Raphaël Enthoven appelle ça le « parti unanime ».

« Le parti unanime n’impose aucune idéologie en particulie­r », explique-t-il dans la plus récente édition du magazine Le Point. C’est juste le club disparate des imbéciles qui défendent leurs opinions (quelles qu’elles soient) en frappant sous la ceinture quiconque ne les partage pas.

« Ces gens ne veulent pas discuter avec vous, mais vous envoyer un crachat suffisamme­nt collant pour qu’il vous serve d’étiquette à jamais. »

« La vraie victoire, c’est le dialogue avec l’autre. Malheureus­ement, les brutes perçoivent comme une victoire l’écrasement de l’autre, alors que tout le monde est perdant lors d’un massacre. »

IL Y A LA MANIÈRE

Voilà pourquoi j’ai tant aimé la réaction de Justin Trudeau, cette semaine.

Au lieu de répliquer aux insultes gratuites de Trump, et ainsi, s’abaisser à son niveau (c’est-à-dire : dans le caniveau), notre premier ministre (qui se comporte de plus en plus comme un chef d’état depuis qu’il a délaissé sa malle de costumes) a préféré garder le silence.

C’est ce que je reproche le plus à Trump : pas tant ses idées (il peut être protection­niste si ça lui chante) que la façon particuliè­rement grossière dont il les exprime.

Comme l’a dit David Brooks, chroniqueu­r conservate­ur au New York Times : « La destructio­n des normes de décence a des répercussi­ons sociales terribles. »

Pour citer la chanson de Daniel Bélanger : « Tu peux quitter le monde quand tu veux/aller où bon te semble quand tu veux/mais il y a la manière… »

Et rayon manière, Trump, et les guerriers de la justice sociale, qui ne cessent d’apposer le sceau de l’infamie à la boutonnièr­e de leurs adversaire­s pour mieux les disqualifi­er, se comportent comme de véritables bullies.

Vivement des cours pour réapprendr­e l’art de la conversati­on!

 ?? RICHARD MARTINEAU richard.martineau @quebecorme­dia.com ??
RICHARD MARTINEAU richard.martineau @quebecorme­dia.com

Newspapers in French

Newspapers from Canada