Le Journal de Quebec

Mystère autour de l’investisse­ment de l’état québécois dans la C Series

« Une limitation à notre travail », déplore le bureau de la vérificatr­ice générale

- SYLVAIN LAROCQUE ET ALEXANDRE ROBILLARD

Les Québécois ne connaîtron­t pas la valeur réelle du plus important investisse­ment jamais réalisé par leur gouverneme­nt dans une entreprise.

Situation inusitée, la vérificatr­ice générale se dit incapable de valider l’évaluation faite par Québec de son investisse­ment de 1,3 G$ dans la gamme d’avions C Series de Bombardier, le gouverneme­nt ayant refusé de collaborer pleinement avec elle.

« Je n’ai pas été en mesure d’obtenir les éléments probants suffisants et appropriés concernant la valeur comptable de ce placement au 31 mars 2018 », écrit Guylaine Leclerc dans son rapport sur les états financiers du Fonds du développem­ent économique (FDE), publiés mercredi.

Géraldine Bouchard-vézina, porte-parole de Mme Leclerc, a carrément parlé hier d’une « limitation » au travail de la vérificatr­ice générale.

En 2016, Québec a rescapé la C Series en injectant 1,3 G$ pour acquérir une participat­ion de 49,5 % dans le programme en difficulté. Par la suite, Airbus a obtenu une participat­ion de 50,01 % dans la C Series pour 0 $. La part de Québec n’est plus que de 16 %, contre 34 % pour Bombardier.

PERTE LIMITÉE À 166 M$ ?

Les comptables retenus par Québec estiment que la valeur de la participat­ion du gouverneme­nt dans la C Series oscille entre 1,134 G$ et 1,3 G$. Cela signifiera­it que Québec aurait perdu jusqu’à 166 M$ en moins de deux ans.

« La valeur réelle du placement n’est pas inférieure à son coût, et si elle l’était, cette dépréciati­on ne serait pas de longue durée », lit-on dans les états financiers.

Or, la vérificatr­ice générale évoque sans détour une dépréciati­on. Comme le gouverneme­nt ne lui a pas communiqué toutes les informatio­ns pertinente­s sur l’investisse­ment controvers­é, cela fait en sorte que « je n’ai pas pu déterminer si le placement aurait dû faire l’objet d’une moins-value durable », indique-t-elle.

Par conséquent, la vérificatr­ice générale a formulé une « réserve » sur les états financiers du FDE, un fait rarissime.

ANGLADE RÉAGIT

Étonnammen­t, la ministre de l’économie, Dominique Anglade, a dit hier au Journal qu’elle n’était « pas en désaccord avec l’avis rendu par la vérificatr­ice générale ». Selon elle, le manque d’informatio­n que déplore Guylaine Leclerc s’explique par la conclusion prochaine de la transactio­n avec Airbus, le 1er juillet.

« Il y a des parties qui sont mouvantes », a affirmé Mme Anglade, en reconnaiss­ant néanmoins que la valeur du placement dans la C Series « pourrait avoir augmenté ou baissé ».

Dominique Anglade a noté que l’investisse­ment comporte également des droits sur des actions de Bombardier dont la valeur est estimée à 270 millions $ US.

« JE N’AI PAS ÉTÉ EN MESURE D’OBTENIR LES ÉLÉMENTS PROBANTS »

– Guylaine Leclerc, vérificatr­ice générale du Québec

« IL Y A DES PARTIES QUI SONT MOUVANTES »

– Dominique Anglade, ministre de l’économie du Québec

 ?? PHOTOS SIMON CLARK ET D’ARCHIVES, AGENCE QMI ?? En 2016, Québec a injecté 1,3 milliard de dollars pour acquérir une participat­ion dans le programme C Series de Bombardier.
PHOTOS SIMON CLARK ET D’ARCHIVES, AGENCE QMI En 2016, Québec a injecté 1,3 milliard de dollars pour acquérir une participat­ion dans le programme C Series de Bombardier.

Newspapers in French

Newspapers from Canada