Le Journal de Quebec

LES BEAUX JOURS DE LOUISE TREMBLAYD’ESSIAMBRE

L’écrivaine, mère de 9 enfants et grand-mère de 11 petits-enfants, vient de terminer son 45e roman

-

Figurant parmi les auteures les plus prolifique­s du Québec, Louise Tremblay-d’essiambre en était à l’écriture des dernières lignes de son 45e roman lorsque je l’ai rencontrée, au coeur de son petit coin de paradis.

J’ai rejoint la reine québécoise du best-seller – elle a vendu plus de deux millions d’exemplaire­s de ses livres au Québec et en France – là où elle habite depuis une dizaine d’années, dans la région de Montréal.

Dans le solarium avec vue sur la rivière, elle chasse gentiment ses deux magnifique­s chats, allergies obligent. Les chauds rayons du soleil enveloppen­t le paysage enchanteur qui, pas de doute, s’avère propice à l’inspiratio­n.

L’auteure vient de lâcher son manuscrit pour une séance de photos, puis pour l’entrevue. « Je vais terminer ça tantôt, et l’envoyer ce soir à l’éditrice, qui veut le lire avant de partir en vacances cette semaine », me dit-elle sur le ton de celle qui en a vu d’autres. « C’est tout dans ma tête », lance-t-elle devant ma mine ébahie.

DEVENIR CHIRURGIEN­NE

Mme Tremblay-d’essiambre a en fait adopté une nouvelle méthode de travail il y a deux ans. Elle écrit 1000 mots par jour, à raison de 250 jours par année. « Ça fait 250000 mots, c’est quatre romans de 400 pages », lance-t-elle fièrement.

Grâce à cette discipline, elle peut profiter d’un rythme de vie agréable et s’adonner à ses autres passions, soit le dessin et la peinture. Ses oeuvres illustrent d’ailleurs plusieurs de ses romans.

Fait plutôt rare de nos jours, elle est aussi mère de neuf enfants, qui sont âgés de 17 à 46 ans, et qui lui ont donné 11 petits-enfants. Comme la cadette aura bientôt atteint l’âge adulte, elle y voit un premier pas vers la retraite. « La retraite, c’est pour moi beaucoup plus une façon de vivre que d’arrêter d’écrire, car je n’arrêterai jamais d’écrire […] Mais je me sens libre, tellement plus libre. »

Victime de la bactérie mangeuse de chair à l’âge de 38 ans, elle n’a plus peur de la mort et croit à une autre vie après. D’ici là, elle souhaite suivre les traces de son père, comptable, qui a continué d’être actif jusqu’à 92 ans.

« Je vais faire une Janette Bertrand de moi-même et je vais aller le plus loin possible, glisse-t-elle, rappelant qu’on l’a déjà comparée à Mme Bertrand avant que celle-ci ne se mette à l’écriture. Comme elle, je m’intéresse souvent à des sujets tabous. »

SOUVENIRS DE QUÉBEC

Puis nous voilà parties pour remonter loin, très loin dans ses souvenirs, jusqu’à son enfance à Québec, alors que Sainte-foy était encore constitué de rues en terre, à une époque où des vaches paissaient dans les champs de la laiterie Borden.

Et je découvre que Mme Tremblay-d’essiambre n’a pas que des talents d’écrivaine, mais aussi de conteuse. « C’était vraiment la campagne, et il n’y avait qu’une seule paroisse », se souvient-elle, ajoutant qu’elle a aussi vu la constructi­on des centres commerciau­x Place Laurier et Place Sainte-foy, qui, pour tout bon résidant du secteur, paraissent avoir toujours fait partie du décor.

Si elle adorait écrire dès son plus jeune âge, elle se voyait accomplir une brillante carrière de chirurgien­ne. Elle fréquentai­t alors le Collège Jésus-marie et avait été acceptée à l’université Laval.

« Mais mon père a décidé qu’une femme ne devenait pas médecin », relate-t-elle, spécifiant qu’elle ne lui en veut pas. Elle s’est donc dirigée vers les sciences infirmière­s, mais, peu intéressée, elle a fini par abandonner les cours. « Je rêvais aussi d’avoir une grosse famille. »

Elle s’est mariée et a eu huit enfants, qu’elle a élevés à Saint-nicolas, sur la rive sud de Québec. La cadette est née de sa seconde union, alors qu’elle avait 48 ans.

Pour en revenir à l’écriture, c’est au début de la trentaine qu’elle a publié un premier roman. Une pause de quelques années a suivi, mais les livres se sont ensuite succédé de 1994 à aujourd’hui.

On pourrait croire que le travail l’a amenée à quitter Québec. « Non, en fait, je pourrais être à Tombouctou et pour mon travail ça ne changerait pas grand-chose, s’exclame-t-elle. Surtout avec internet aujourd’hui. »

Elle a plutôt mis le cap sur la métropole pour suivre son nouveau conjoint, qui est lui aussi originaire de Québec, et avec qui elle file des jours heureux.

DES VOYAGES DANS LES CARTONS

Le couple a l’intention de beaucoup voyager au cours des prochaines années, ce que permet le métier d’écrivain. « Il y a bien des coins que je n’ai pas vus, et j’ai quand même des amis et de la parenté qui sont partis avant l’âge que j’ai, alors je ne niaiserai pas avec ça. »

Déjà, elle est devenue une habituée de Paris, où ses livres sont très appréciés et où elle travaille avec une maison d’édition. Elle s’y rend au moins une fois par année. « J’ai mon petit hôtel, mon petit coin, mes commerçant­s et serveurs de restaurant­s que je connais, et qui sont contents de me voir. »

Au Québec, étonnammen­t, elle parvient encore à passer incognito, malgré son grand succès. « Les gens ne me reconnaiss­ent pas, et ça fait mon affaire. Je ne suis pas une bête de scène. Par contre, si on me reconnaît et m’approche gentiment, ça me fait toujours plaisir. »

Fait étonnant, Louise Tremblay-d’essiambre n’a jamais reçu de prix littéraire, malgré son immense succès. Mais « peu importe » dit-elle, car sa reconnaiss­ance, c’est le public qui la lui donne.

 ??  ??
 ??  ?? En plus d’être une auteure très prolifique, Louise Tremblay-d’essiambre est mère de neuf enfants. L’été, toute la famille se retrouve à Myrtle Beach, où son conjoint et elle possèdent une roulotte. PHOTO CHANTAL POIRIER
En plus d’être une auteure très prolifique, Louise Tremblay-d’essiambre est mère de neuf enfants. L’été, toute la famille se retrouve à Myrtle Beach, où son conjoint et elle possèdent une roulotte. PHOTO CHANTAL POIRIER

Newspapers in French

Newspapers from Canada