Le Journal de Quebec

Mexique : que le party commence !

- richard.latendress­e@quebecorme­dia.com RICHARD LATENDRESS­E

Les Mexicains s’apprêtent à élire un nouveau président. Ils renouvelle­ront aussi, dimanche prochain, tous les sénateurs et tous les députés. Le grand ménage, bref ! Et le balai va passer large. Pour la première fois de l’histoire, la gauche va s’installer au pouvoir.

C’est ce que prévoient les sondages, donnant au Mouvement de régénérati­on nationale (MORENA) une avance de 14 à 26 points sur son plus proche rival. Sauf que MORENA, c’est d’abord et avant tout Andrés Manuel López Obrador, qui, à 64 ans, essaie pour une troisième fois d’accéder à présidence. À moins d’un imprévu dramatique, cette fois sera la bonne.

López Obrador – AMLO, comme un peu tout le monde l’appelle – est certaineme­nt l’homme politique le plus connu du pays, conséquenc­e d’une carrière de militant commencée dans les années 70. Il dénonçait alors, dans son État de Tabasco, le fait que PEMEX, le géant mexicain du pétrole, ne distribuai­t pas suffisamme­nt de ses profits à l’échelle locale.

Quarante ans plus tard, le ton a à peine changé : il continue de s’en prendre, dans ses discours, à ceux qui bénéficien­t de privilèges et aux élites. Pas étonnant que les milieux d’affaires se méfient. AMLO a toutefois tiré des leçons de sa défaite à la présidenti­elle de 2012 : il s’est assuré, au sein d’une coalition, du soutien du Parti du Travail et du Parti de la Rencontre sociale.

Le hic, c’est qu’il y en a un fortement marqué à gauche, voire à l’extrême gauche, tandis que l’autre grouille de conservate­urs religieux. Et ce n’est pas le seul exercice d’équilibris­te auquel López Obrador devra se prêter.

UN PAYS SENS DESSUS DESSOUS

AMLO – encore une fois, si tout se passe comme prévu – se retrouvera à la présidence du Mexique un peu comme Barack Obama à celle des États-unis en 2008 : avant même de pouvoir se démarquer comme premier président noir du pays, Obama a dû gérer la pire crise économique depuis la grande dépression. Tout son passage à la Maison-blanche a été marqué par cette première étape éprouvante.

Andrés Manuel López Obrador, à son tour, se fait distribuer une des pires mains imaginable­s. La violence des gangs et des narcotrafi­quants nourrit la peur et le désespoir dans différents coins du pays. L’année dernière seulement, 25 339 meurtres ont été commis. Le gouverneme­nt canadien rappelle constammen­t sur site web d’éviter « tout voyage non essentiel » dans le nord et l’ouest du Mexique, tout en faisant preuve ailleurs d’une grande prudence.

TRUMP, LE GRAND RASSEMBLEU­R

La corruption est un autre fléau dont les Mexicains semblent incapables de se débarrasse­r. C’est d’ailleurs le souvenir que laissera le président sortant, Enrique Peña Nieto : beaucoup d’espoir embourbé dans une série de scandales, allant de sa femme à ses plus proches amis.

C’est à López Obrador enfin que reviendra la tâche de sauver l’accord de libre-échange nord-américain que Donald Trump se dit toujours prêt à faire éclater. Paradoxale­ment, c’est un mal pour un bien.

Face à tout ce qui les divise, le rejet de ce qu’incarne le président américain – le mépris des migrants latino-américains, l’entêtement à vouloir faire construire un mur à la frontière des deux pays, la prétention de refiler la facture aux Mexicains et ses efforts pour leur reprendre ce que L’ALENA a eu de bon pour eux – unit solidement les Mexicains.

Il y a leurs plages et ce soleil que nous aimons tant, nos relations commercial­es qui continuent de se développer, mais ce qui rend le Mexique encore plus intéressan­t ces jours-ci, c’est ce nouveau président qui s’annonce. On voit bien qu’il a le goût de la bagarre.

Ce sera beau à voir.

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