Le Journal de Quebec

Mort d’un héros

- CLAUDE VILLENEUVE

La vie a de ses ironies. C’est peu après que la fête nationale a été l’occasion de célébrer nos « histoires de héros » que s’éteint l’une de nos plus grandes figures du dernier demi-siècle.

Peu de gens ont fait l’unanimité au Québec comme Paul Gérin-lajoie. Le premier ministre de l’éducation de notre histoire suscitait l’admiration dans toutes les familles politiques.

Plus qu’à nul autre, on lui accordait le respect dû aux pères de la Révolution tranquille, dont il aura été par ailleurs l’un des derniers représenta­nts vivants.

UNE TÊTE BIEN FAITE

Issu d’une famille qui a énormément donné à la vie publique québécoise, monsieur Gérin-lajoie a été l’un des premiers diplômés québécois de l’université d’oxford. Avocat, docteur en droit puis journalist­e, il appartenai­t à cette génération de têtes bien faites pour qui l’action politique devint un devoir, en réponse au duplessism­e.

Ministre de la Jeunesse en 1960, c’est peut-être là qu’il trouva le fil directeur de plusieurs décennies de service. En formulant en 1965 ce qu’on appelle encore « la doctrine Gérin-lajoie », selon laquelle les compétence­s internes du Québec se prolongent à l’internatio­nal, il a fourni un cadre qui allait nous permettre d’exister au monde.

PERSPECTIV­E GLOBALE

Combien de jeunes Québécois auront été sensibilis­és à leur capacité d’agir pour la coopératio­n internatio­nale à travers la dictée PGL? Inversemen­t, combien de jeunes francophil­es de la planète auront appris à connaître notre bout de terre grâce à son travail ? Paul Gérin-lajoie avait pressenti qu’il faudrait offrir aux têtes bien faites de l’avenir des expérience­s à l’étranger pour penser leur action dans une perspectiv­e globale.

Jusqu’à la fin de sa vie, monsieur Gérin-lajoie est demeuré un ami de la jeunesse. En l’écoutant s’exprimer régulièrem­ent sur les questions d’éducation, on percevait aisément que derrière sa voix désormais éraillée se trouvait encore un esprit d’une acuité extrême et d’une lucidité rare.

Hier, le Québec a perdu un héros. Toutefois, une famille a perdu un père, un grand-père et un arrière-grand-père adoré. Oublions momentaném­ent notre propre chagrin pour lui exprimer notre sympathie la plus sincère.

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