LA GUERRE OFFICIELLEMENT
WASHINGTON | Pékin a saisi hier l’organisation mondiale du commerce (OMC) pour contester l’entrée en vigueur de droits de douane américains de 25 % sur 34 milliards de dollars d’importations chinoises, estimant l’administration Trump responsable du déclenchement de « la plus grande guerre commerciale de l’histoire économique ».
La Chine avait promis « de ne pas tirer la première », mais avait prévenu : « pour défendre les intérêts fondamentaux du pays et de sa population », elle sera contrainte de riposter.
Après avoir annoncé la mise en oeuvre immédiate de droits de douane de 25 % sur un montant « égal » sur quelque 540 produits américains, le ministère du Commerce a annoncé hier le recours à L’OMC.
Il ne s’agit pas d’une nouvelle plainte, mais d’un additif à celle qui avait été déposée par le géant asiatique pour contester l’imposition, en mars dernier, des taxes punitives de 25 % sur l’acier et de 10 % sur l’aluminium, a précisé une source à Genève.
818 PRODUITS CHINOIS
Les nouveaux tarifs douaniers américains, entrés en vigueur hier, affectent 818 produits chinois, dont des automobiles, des disques durs ou des composants d’avions, mais épargnent des produits populaires comme les télévisions et téléphones.
Un second lot de taxes, sur 16 milliards d’importations, entrera prochainement en vigueur, a rappelé jeudi Donald Trump, évoquant un délai de « deux semaines ».
Au total, ce sont 50 milliards de dollars d’importations chinoises annuelles qui seront donc affectées par les mesures américaines, destinées à compenser ce que l’administration Trump considère comme un « vol » de propriété intellectuelle et de technologies par la Chine.
Les États-unis ne devraient pas en rester là puisque Donald Trump menace de porter à 450 milliards la valeur des produits chinois taxés, soit la grande majorité des importations venues du géant asiatique (505,6 milliards de dollars en 2017).
Paradoxalement, ce sont ces mêmes tensions commerciales qui ont fait tomber le déficit commercial des États-unis en mai à 43,1 milliards $, son plus bas niveau depuis octobre 2016, en dopant les exportations de soja vers la Chine (+89,6 %) avant que cette denrée ne soit taxée.
Depuis des mois, la perspective d’une guerre commerciale fait toutefois redouter un coup d’arrêt des échanges de marchandises à travers la planète, actuels moteurs de la croissance mondiale.
INQUIÉTUDES
Le premier ministre chinois Li Keqiang, actuellement en Bulgarie, a averti hier qu’une « guerre commerciale ne profite à personne ».
Dans les rues de Pékin, des consommateurs s’inquiétaient par ailleurs de possibles hausses des prix consécutives aux taxes sur les produits américains. Pour autant, ils se disent solidaires des autorités.
« Je ferai de mon mieux pour acheter chinois », a ainsi témoigné M. Yang, client d’une supérette.
Du côté américain, la fédération des détaillants a affirmé que plusieurs produits vendus aux États-unis pourraient voir leurs prix augmenter, « les étudiants devant débourser plus pour le mini-réfrigérateur dont ils auront besoin à l’université à l’automne ».
CONSÉQUENCES ?
Cette confrontation avec Pékin est loin d’être isolée. Depuis le début de l’année, Donald Trump a multiplié les mesures protectionnistes à l’encontre de ses partenaires commerciaux, suscitant exaspération et inquiétude.
La Maison-blanche impose aussi depuis le 1er juin des droits de douane sur les importations d’acier et d’aluminium en provenance du Canada, de l’union européenne, du Mexique ou de la Russie, qui ont porté l’affaire devant L’OMC.
La majorité des experts met en garde contre les dégâts potentiels d’une telle politique, non seulement sur l’économie américaine, mais aussi sur l’économie mondiale.
Or, ces dernières semaines, des entreprises américaines ont averti qu’elles pourraient licencier, faute de rester compétitives, voire mettre la clé sous la porte.