Le Journal de Quebec

Coûteux revers pour un entreprene­ur en constructi­on

La Cour supérieure ramène la sanction de 50 $ à quelque 13 000 $

- KATHRYNE LAMONTAGNE

Un entreprene­ur en constructi­on qui avait réussi à faire passer une sanction de 13000 $ à 50 $ devant les tribunaux devra finalement acquitter l’amende initiale, a tranché la Cour supérieure.

En 2016, Raynald Bédard, de Neuville, s’exposait à l’amende minimale prévue par la loi pour ne pas avoir été en possession d’une licence d’entreprene­ur. On reprochait à l’homme d’affaires, à la tête de l’entreprise de gestion de projets Solutions Gestion Design, d’avoir donné des directives à un travailleu­r qui s’affairait sur un contrat d’une valeur de 240 $.

EN APPEL

Soutenu par l’associatio­n des profession­nels de la constructi­on et de l’habitation du Québec (APCHQ), Raynald Bédard a contesté la sanction et les frais totalisant 13 000 $. La Cour du Québec lui a donné raison, en juillet 2017, déclarant que l’amende minimale imposée était « cruelle et inu- sitée », donc inconstitu­tionnelle. Il a été condamné à une amende de 50 $.

Le Directeur des poursuites criminelle­s et pénales (DPCP) a porté le jugement en appel et a obtenu gain de cause, le 19 juillet dernier. La Cour supérieure conclut que la sanction monétaire n’est pas « totalement ou exagérémen­t disproport­ionnée » au point d’être « incompatib­le avec la dignité humaine », ce qui ne va pas à l’encontre de la Charte des droits et libertés.

Le juge François Huot rétablit donc l’amende minimale dans cette affaire et rappelle qu’à ce jour, « aucune cour d’appel canadienne n’a invalidé une peine monétaire au motif qu’elle constituer­ait une peine cruelle et inusitée ».

AMENDES SALÉES

Depuis 2011, dans la foulée des scandales liés au domaine de la constructi­on, la peine pécuniaire pour un individu qui n’est pas titulaire d’une licence d’entreprene­ur est de quelque 10 000 $. Elle grimpe à plus de 33 000 $ pour une personne morale.

Plaidant l’erreur de bonne foi pour justifier son cas, Raynald Bédard soutenait que la loi visait principale­ment les « travailleu­rs au noir » et les « fraudeurs ». Le juge Huot rejette cette prétention, affirmant que la législatio­n a aussi pour objectif d’enrayer les travaux de constructi­on effectués sans licence, une infraction perpétrée à de multiples occasions entre 2009 et 2011.

« GAGE DE QUALITÉ »

Bien qu’il peut sembler à première vue « excessif » d’imposer l’amende minimale à un « contrevena­nt de bonne foi, sans antécédent et n’ayant réalisé qu’un profit négligeabl­e », la licence « constitue un gage de qualité des travaux », nuance le juge Huot.

« Elle protège ainsi le public des gens qui décideraie­nt de s’improviser entreprene­urs », poursuit-il. Ce faisant, « aucune intention frauduleus­e » n’est « nécessaire » pour que des travaux « non conformes soient réalisés par un entreprene­ur non qualifié », tranche-t-il.

Raynald Bédard et L’APCHQ étudient actuelleme­nt la possibilit­é de s’adresser à la Cour d’appel. De son côté, le DPCP n’a pas voulu commenter.

 ?? PHOTO D’ARCHIVES, ANNIE T. ROUSSEL ?? À la tête de Solutions Gestion Design, Raynald Bédard n’exclut pas la possibilit­é de porter en appel la décision de la Cour supérieure pour contester à nouveau l’amende de 13 000 $ à laquelle il s’expose.
PHOTO D’ARCHIVES, ANNIE T. ROUSSEL À la tête de Solutions Gestion Design, Raynald Bédard n’exclut pas la possibilit­é de porter en appel la décision de la Cour supérieure pour contester à nouveau l’amende de 13 000 $ à laquelle il s’expose.

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