Le Journal de Quebec

La fin des fonds à frais de sortie

- Fabien Major Fabien Major est conseiller en épargne collective pour Major Gestion Privée Inc. de Gestion financière Assante ltée. Finances personnell­es

À moins de circonstan­ces extraordin­aires, les fonds communs à frais de sortie vont disparaîtr­e prochainem­ent du paysage canadien.

Depuis 30 ans, il est possible d’acheter des fonds de placement sans que le montant à investir soit diminué par une commission à l’achat prélevée par les firmes de courtage. Les sociétés de fonds finançaien­t donc les commission­s des représenta­nts si les clients gardaient une bonne partie de leurs avoirs pendant trois, quatre ou même sept ans.

Les clients qui souhaitent racheter ce genre de placement doivent donc rembourser la commission « financée » à l’origine (qu’ils n’ont pas eu à payer). Ça se présentait sous forme de pénalité dégressive dans le temps. Ces frais peuvent correspond­re jusqu’à 5,5 % de la valeur investie, et diminuent chaque année. Pour accommoder les clients aux prises avec des dépenses imprévues, un montant équivalant à 10 % de la valeur peut toujours sortir en tout temps, sans frais.

Voilà que les autorités canadienne­s de marchés financiers (ACM) viennent de publier leurs intentions de réglemente­r davantage le secteur des valeurs mobilières. Elles entendent éliminer complèteme­nt les fonds à frais au rachat, estimant que ce type de « financemen­t » des commission­s des conseiller­s et planificat­eurs crée un conflit d’intérêts potentiel et emprisonne les investisse­urs sur une longue période. Elles n’ont pas tort, mais oublient les effets collatérau­x.

LES PETITS INVESTISSE­URS ABANDONNÉS

Depuis environ cinq ans, les fonds à frais de sortie ne sont pratiqueme­nt plus utilisés. En 2017, seulement 13 % des ventes de fonds ont été réalisées dans ce segment. Donc, 87 % des transactio­ns se dirigent vers les placements à honoraires (parfois intégrés au produit) ou assortis de commission­s à l’achat variant de 1 à 5 %.

Comme les dirigeants des grands cabinets l’ont vu venir, ils ont incité leurs conseiller­s à s’associer entre eux et ont considérab­lement augmenté le montant minimum à investir pour « écrémer leur base de clients ». Dans certains cas, ils refusent les clients qui ont moins de 300 000 $ à investir.

Pour le conseiller en début de carrière, les frais reportés donnaient l’élan nécessaire pour se bâtir une clientèle. Pour vous donner une idée de grandeur, 10 000 $ placés à long terme en FAR pouvaient rapporter 350 $ (une seule fois) au conseiller. Dans la nouvelle structure, le client pourrait voir son 10 000 $ amputé de 500 $ par une commission initiale ou bien le conseiller doit accepter de n’être rémunéré qu’environ 70 $ par année. Il lui en faudra des millions en gestion pour gagner convenable­ment sa vie.

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