Le Journal de Quebec

Les Québécois dangereux au volant

Le Journal a filmé les routes de Québec et Montréal durant un mois et a capté plusieurs manoeuvres dangereuse­s

- RACHELLE MC DUFF Le Journal de Montréal

Les conducteur­s québécois sont dangereux au volant, tant pour eux-mêmes que pour les autres, et multiplien­t les infraction­s routières, a constaté Le Journal après une cinquantai­ne d’heures à parcourir les routes des grandes régions de Québec et de Montréal.

Excès de vitesse en zone de travaux, conduite à contresens, dépassemen­t sur une ligne continue, pas de clignotant pour tourner : nos caméras installées sur une motocyclet­te et une voiture ont filmé 703 infraction­s routières toutes plus risquées les unes que les autres durant les mois de juin, juillet et août.

Les nombreuses inconduite­s captées n’étonnent pas du tout l’expert en sécurité routière du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), André Durocher. « Mon constat est le même que le vôtre : les gens sont indiscipli­nés sur les routes », affirme l’inspecteur.

« Je pense que les Nord-américains com- parativeme­nt aux Européens ne prennent pas la conduite automobile au sérieux. Les gens ne sont plus dans la voiture pour conduire, mais pour se déplacer, d’un point A au B. On se dit : “C’est ma route, c’est moi qui prends le chemin, on coupe.” Un manque assez flagrant de civisme », affirme quant à lui Philippe Létourneau, ancien pilote de course automobile et instructeu­r de conduite.

PEUR POUR SA SÉCURITÉ

Au cours de chacune de leurs sorties sur les routes, les représenta­nts du Journal se sont fait à plusieurs reprises brusquemen­t couper la voie par des conducteur­s occupés à faire autre chose ou qui ne vérifiaien­t pas leurs angles morts.

Mais par deux fois, nous avons particuliè­rement craint pour notre sécurité.

Dans la zone de travaux de l’autoroute Bonaventur­e, à Montréal, où la limite de vitesse est de 50 km/h, un camionneur qui nous suivait de trop près en nous klaxonnant à répétition nous a finalement dépassés à la dernière minute afin de prendre la sortie.

Dans la même zone, au cours d’une autre sortie, Le Journal a été la cible de regards réprobateu­rs d’automobili­stes frustrés par notre « lenteur », nous dépassant à grande vitesse et de trop près. Nous respection­s pourtant la limite de vitesse.

Le pont Pierre-laporte à Québec a aussi été le théâtre d’une manoeuvre risquée. Un véhicule s’est en effet subitement glissé devant celui de notre journalist­e. L’automobili­ste téméraire a franchi sans sourciller une ligne continue au beau milieu du pont, frôlant du coup l’aile de notre voiture.

DISTRACTIO­NS

Devant ces constats, il n’est malheureus­ement pas étonnant d’apprendre que pas moins de 91 % des Québécois auraient des habitudes dangereuse­s au volant, liées entre autres au cellulaire, au GPS ou à une panoplie de fonctionna­lités intégrées dans leur voiture, selon un récent sondage Léger réalisé pour la compagnie d’assurances Allstate.

« La SAAQ utilise tout le temps le mot accident, souligne Erick Abraham, ingé- nieur et associé de recherche de l’équipe de sécurité routière de l’école Polytechni­que de Montréal. Allez lire la définition du mot accident : c’est quelque chose d’imprévisib­le. En pratique, quand les gens sont distraits, c’est qu’ils font autre chose pendant qu’ils sont en train de conduire. Quand ils font une collision, ce n’est pas un accident, ce n’est pas le plancher de la voiture qui a cédé ! »

« Il ne faut pas laisser les gens créer ces mauvaises habitudes. Quand on a commencé à soulever le problème du textage au volant, on aurait dû être plus sévère tout de suite pour ne pas que les gens embarquent dans cette mauvaise habitude-là », croit M. Létourneau.

Un point de vue que partage M. Abraham, qui croit qu’il y a du laxisme dans l’applicatio­n du code de la sécurité routière. « On tolère souvent de rouler à 118 km/h dans une zone de 100. Mais plus on donne de la marge de manoeuvre aux gens, plus ils vont en profiter », avance l’ingénieur.

-Avec la collaborat­ion d’arnaud Koenig-soutière

 ?? PHOTOS MARTIN ALARIE ET CAPTURE D’ÉCRAN ?? Le cellulaire au volant est interdit par la loi. L’amende pour une première infraction va de 300 à 600 $. Une récidive peut entraîner la suspension du permis de conduire. En mortaise, un camionneur qui suivait la moto d’un représenta­nt du Journal s’est fait menaçant à plusieurs reprises, klaxonnant parce que nous ne roulions pas plus vite que la limite de vitesse permise sur une autoroute.
PHOTOS MARTIN ALARIE ET CAPTURE D’ÉCRAN Le cellulaire au volant est interdit par la loi. L’amende pour une première infraction va de 300 à 600 $. Une récidive peut entraîner la suspension du permis de conduire. En mortaise, un camionneur qui suivait la moto d’un représenta­nt du Journal s’est fait menaçant à plusieurs reprises, klaxonnant parce que nous ne roulions pas plus vite que la limite de vitesse permise sur une autoroute.

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