Le Journal de Quebec

Arabie saoudite : belle hypocrisie

- LISE RAVARY lise.ravary@quebecorme­dia.com

Désolée d’avoir à introduire le sujet du pétrole dans la querelle Canada-arabie saoudite. On en parle peu, et pourtant c’est le coeur du débat. Sans l’or noir, l’arabie saoudite ne serait qu’un royaume arriéré au milieu du désert.

Mais son pétrole lui assure un premier rôle sur la scène mondiale et lui permet d’acheter l’obéissance de ses sujets, prisonnier­s d’un État médiéval totalitair­e.

Malgré les tensions actuelles entre le Canada et l’arabie saoudite, les livraisons de pétrole, de 100 000 à 125 000 barils par jour à destinatio­n de la raffinerie Irving au Nouveau-brunswick, n’ont pas cessé. L’entreprise d’état Saudi Aramco ne mélange jamais pétrole et politique.

De 10 à 15 % du pétrole utilisé dans l’est du Canada provient de l’arabie saoudite.

De 10 à 15 % du pétrole utilisé dans l’est du Canada provient de l’arabie saoudite.

TANT DE RAISONS

Malgré ses violations constantes des droits de l’homme, malgré Samar et Raif Badawi, malgré la malheureus­e Nathalie Morin coincée là-bas avec ses enfants, malgré cette guerre atroce contre le Yémen voisin, déclenchée par vanité, malgré le bombardeme­nt d’autobus scolaires remplis d’enfants, et maintenant malgré cette crise de nerfs du prince héritier Mohammed ben Salmane qui se traduit par une chicane diplomatiq­ue avec le Canada, nous continuons d’acheter leur pétrole.

L’arabie saoudite est un pays cruel dirigé par des fanatiques, mais nous préférons regarder dans l’autre direction pendant que des milliers de barils sont transférés de tankers qui arrivent de la péninsule arabique aux installati­ons de raffinage de la Irving Oil, les plus importante­s au Canada.

Comme si nous n’avions pas nous aussi du pétrole enfoui dans le sable. Pas le même sable, mais quand même. D’ailleurs, je n’entends jamais la gauche condamner le pétrole du Venezuela qui, lui aussi, est extrait de sables bitumineux. Mais ce sont des socialiste­s… pas des pollueurs capitalist­es.

Je sais, l’exploitati­on du pétrole contribue aux changement­s climatique­s. Ce qui n’a pas empêché la très pure Norvège, où 40 % des autos vendues sont électrique­s, d’exploiter le sien en mer du Nord pour financer ses grands projets d’énergie renouvelab­le.

Mais pas ici. Pas d’exploratio­n au Québec, pas de nouveaux pipelines. Et payons les éoliennes non rentables de nos poches.

PAS DE PIPELINE

Malgré Lac-mégantic, les Québécois ont développé une allergie quasi irrationne­lle aux pipelines. Mais personne ne s’inquiète des dangers du pétrole étranger qui entre par super pétroliers sur le Saint-laurent, environ 500 000 barils par jour, selon le Financial Post. Et les milliards que nous envoyons au Nigeria, au Kazakhstan et en Algérie.

Sans oublier aux États-unis, d’où proviennen­t 2/3 de nos importatio­ns. En grande partie du pétrole de schiste tant détesté.

De plus, nous pestons contre le pouvoir polluant du pétrole, mais nous achetons des véhicules de plus en plus gros, camionnett­es série F en tête de liste. Elles ne roulent pas à l’air.

Voici mon fantasme : je me présente à une station-service, ma petite Golf a soif. Je choisis la pompe sur laquelle c’est écrit « Pétrole 100 % canadien ». Ce serait difficile à réaliser. Il faudrait des lois contraigna­ntes pour l’industrie, mais que le 3e pays au classement des réserves mondiales importe du pétrole, surtout des Saoudiens, me semble absurde.

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