RISQUE D’AMPLIFIER LES CRITIQUES
« LE CANADA VA TOUJOURS PARLER FERMEMENT ET CLAIREMENT EN FAVEUR DES DROITS HUMAINS » – Justin Trudeau
RIYAD | (AFP) Avec sa politique étrangère à poigne, l’arabie saoudite veut faire taire les critiques extérieures, mais un raid aérien meurtrier au Yémen et la crise diplomatique avec le Canada vont amplifier la pression internationale sur le royaume, estiment des analystes.
Furieuses après que l’ambassade canadienne a publiquement demandé la « libération immédiate » des militants des droits de l’homme emprisonnés dans le royaume, les autorités saoudiennes ont rappelé leur ambassadeur, expulsé celui du Canada, gelé les relations commerciales et mis fin aux bourses d’études à leurs ressortissants au Canada.
ATTIRER LES INVESTISSEURS
Cette réaction virulente qui n’a pourtant pas fait reculer le Canada pourrait nuire aux efforts de Riyad pour attirer des investissements étrangers. Or, ces derniers sont indispensables pour un ambitieux projet de réforme censé réduire la dépendance saoudienne au pétrole, estiment des experts.
La crise diplomatique avec le Canada souligne combien l’arabie saoudite de Mohammed ben Salmane, prince héritier du puissant royaume, ne tolère aucune critique, qu’elles soient internes ou extérieures, selon des experts.
« Les dirigeants saoudiens ne sont pas particulièrement inquiets de l’influence que pourrait avoir le Canada », explique le cabinet d’analyses Eurasia. « Ils souhaitent plutôt faire taire les critiques, de la part de pays européens notamment, qui pourraient émerger sur d’autres sujets ».
MOINS TOLÉRANTS
Les responsables saoudiens insistent en privé sur le fait que, selon eux, le respect des sensibilités culturelles et la diplomatie à huis clos, même sur des sujets délicats comme les droits de l’homme, sont une approche plus efficace que les dénonciations publiques.
Le Canada a regretté que les puissances occidentales, notamment les États-unis qui ont fourni des milliards de dollars en armes à la coalition menée par les Saoudiens au Yémen, ne l’aient pas soutenu publiquement.
« En l’absence d’une position forte des États-unis (de Donald Trump) sur les droits de l’homme et les valeurs démocratiques, les dirigeants arabes sont de moins en moins enclins à tolérer les conseils des Occidentaux à propos des réformes politiques », explique le cabinet Eurasia.
CONGRÈS MÉCONTENT
« Le président Trump a fait des relations avec Riyad un élément central de sa politique au Moyen-orient », explique Perry Cammack, de la Fondation Carnegie pour la paix internationale. L’arabie est le principal rival régional de l’iran, pays régulièrement critiqué par Washington. « Mais le mécontentement est croissant au Congrès », poursuit-il.
« Entre l’excès de fièvre diplomatique envers le Canada et les atrocités continues au Yémen, il est fort possible que le Congrès tente de restreindre de façon significative l’engagement américain dans le conflit yéménite », selon M. Cammack.