Le Journal de Quebec

Où s’en va le Conseil des arts du Canada ?

- JOSEPH FACAL joseph.facal@quebecorme­dia.com

On s’attend normalemen­t à ce que le discerneme­nt et la prudence soient liés en ce qui concerne la responsabi­lité et la maturité.

Le concept d’appropriat­ion culturelle est désormais endossé par le dirigeant du plus important organisme de soutien à la culture au Canada.

J’ose espérer que je dis moins de bêtises aujourd’hui qu’à 20 ans.

Réunis en congrès samedi dernier, les jeunes du PLQ voulaient que les artistes soient assujettis à « un processus d’octroi des subvention­s plus rigoureux »selon le traitement réservé aux minorités ethniques.

Philippe Couillard a rapidement fermé cette porte.

DÉRIVE

Les jeunes s’étaient emparés de cette notion d’appropriat­ion culturelle, importée des États-unis, sans trop y réfléchir.

Ils ont beaucoup insisté sur le « dialogue » : dialoguer sur quoi exactement ? Jusqu’où ?

Ils ont parlé de « respect » et de « sensibilit­é » : qui juge ce qui est respectueu­x et sensible, et comment ?

C’est un trait propre aux ailes jeunesse de tous les partis : pour faire parler de soi, on embarque dans tous les trains à la mode, surtout quand ils prétendent transporte­r des bons sentiments, mais on descend plusieurs stations au-delà du souhaitabl­e.

Quand ces mêmes sentiments sont repris par des gens dont l’expérience et la responsabi­lité sont grandes, l’affaire devient cependant plus inquiétant­e, d’où la première phrase de cette chronique.

Simon Brault est le directeur et chef de la direction du Conseil des arts du Canada. Il a une longue et riche feuille de route dans le milieu culturel.

Le Conseil des arts du Canada, c’est rien de moins que le plus important organisme public de soutien aux arts du Canada, ce qu’il fait au moyen de subvention­s, de prix et de services d’accompagne­ment aux artistes.

En 2016, le gouverneme­nt Trudeau a annoncé un doublement sur cinq ans de son budget, le faisant passer de 150 millions $ en 2015 à 310 millions $ en 2021.

C’est beaucoup d’argent, et il vient des poches des contribuab­les.

Évidemment, pour décider qui reçoit ou pas de l’argent, il faut des critères.

Que l’on tienne compte, dans l’octroi des subvention­s, de la diversité culturelle de notre société n’est pas déraisonna­ble en soi.

Mais M. Brault semble déterminé à aller beaucoup plus loin.

DANGER

En septembre 2017, il cosignait une lettre dans laquelle on pouvait lire : « L’appropriat­ion des récits, des façons d’être et des oeuvres d’art autochtone­s est tout simplement une continuité du colonialis­me et de l’affirmatio­n de ses droits sur la propriété des peuples autochtone­s. »

Ici, le concept d’appropriat­ion culturelle n’est plus une tocade d’un universita­ire militant, d’un apprenti politicien ou d’un porte-parole d’un lobby.

Il est endossé par le dirigeant du plus important organisme de soutien à la culture au Canada.

Tous ceux qui se soucient de la liberté artistique devraient s’en inquiéter infiniment plus que des cabrioles des jeunes du PLQ.

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Simon Brault

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