Vivre à l’ombre des viaducs colossaux en Italie
AFP | « On le regarde un peu plus, et différemment » : dans le quartier des Gavette, à Gênes, les dizaines d’habitants vivant sous un viaduc colossal de l’autoroute A12 s’inquiètent après l’effondrement meurtrier de celui de l’a10.
« L’écroulement du pont nous a un peu secoués. On espère que celui-ci ne connaîtra pas le même sort », confie Jacopo Strumia, un secouriste de 29 ans qui vit avec sa femme et ses deux enfants dans un appartement au rez-de-chaussée.
Le viaduc sur l’a12, trait d’union entre deux tunnels percés dans la montagne verdoyante, enjambe une rivière asséchée, un entrepôt au toit de tôle et deux rangées de petits immeubles aux tons pastel. Des dizaines d’autres sont construits dans un rayon de 50 mètres.
Accrochée sur les flancs de montagnes qui se jettent dans la mer, toute la ville de Gênes est d’ailleurs sillonnée de ponts et de tunnels.
Depuis mardi, « on le regarde un peu plus, et différemment », surtout qu’avec les vacances, les enfants sont présents toute la journée à la maison, explique Jacopo.
La cohabitation avec le massif voisin n’a jamais été simple. À chaque orage, l’eau s’échappant du viaduc vient se fracasser dans la rue et la petite courette situées devant chez lui. « C’est comme un petit fleuve qui se jette sur nous », dit-il.
OMNIPRÉSENT
Dans ce quartier périphérique du nord de Gênes, le viaduc est omniprésent. Pas une rue d’où il ne soit pas visible. Et le bruit des voitures passant sur les raccords du pont est incessant.
Contrairement au pont Morandi, ce viaduc n’a pas de nom et pas de fiche technique disponible. Il fait « 65 mètres de haut », assure Monica, une serveuse dans un petit bar sans charme situé en contrebas, qui dit tenir l’information d’un ingénieur ayant effectué des mesures au laser il y a quelques mois.
Les anciens du quartier, selon lesquels le pont a été inauguré à la fin des années 1960, hésitent quant à eux entre 73 et 87 mètres de hauteur, pour 700 à 800 mètres de longueur.
« GARANTI 100 ANS »
Tous s’accordent sur un point, qu’ils jugent rassurant : de petits travaux de réfection sont régulièrement effectués et les immenses piles du pont ont été renforcées « il y a une dizaine d’années », affirme Vittorio Depau, un habitant septuagénaire.
« Ils ont dit que c’était garanti 100 ans », poursuit-il. « Je ne suis pas inquiet, je suis habitué, je passe mes journées ici. J’espère juste que je ne serai pas là s’il devait s’écrouler ».
Dans la « salita delle Gavette », un étroit passage en zigzag passant sous le viaduc, Maria Dondero, 59 ans, est moins sereine : « Je n’habite pas ici, je vais juste donner à manger à une vieille dame qui habite au bout de la montée […]. Maintenant, quand je passe sous le pont, je lève les yeux ».