Le Journal de Quebec

Des milliers de Volkswagen TDI en mode veille

- ANTOINE JOUBERT antoine.joubert@quebecorme­dia.com

Rappelons les faits : le 18 septembre 2015, l’agence américaine de l’environnem­ent (EPA) accuse Volkswagen d’avoir truqué volontaire­ment, à l’aide d’un logiciel, la lecture informatiq­ue des émissions d’oxyde d’azote (NOX). Quelques jours plus tard, le géant allemand admet ses torts, mentionnan­t qu’au moins 11 millions de véhicules à travers le monde ont été trafiqués.

Presque quatre ans plus tard, l’impact de ce scandale demeure majeur. En effet, outre les 27 milliards de dollars d’amende jusqu’ici versés par Volkswagen (et ce n’est pas terminé), plusieurs constructe­urs eux aussi dans l’eau chaude ont choisi d’abandonner la vente de moteurs diesel, ou de la reporter. Pensez à Mercedes-benz, qui a complèteme­nt éliminé l’offre des ses moteurs BLUETEC, ainsi qu’à Mazda, qui nous promet son moteur SKYACTIV-D depuis des lunes, sans jamais le commercial­iser.

Le tout s’explique bien sûr par la difficulté des constructe­urs à rendre conformes leurs moteurs diesel sur le plan environnem­ental, mais aussi à les rendre financière­ment viables. À quoi bon offrir un diesel à gros prix, si ce dernier ne consomme guère moins qu’un moteur à essence, qu’il ne performe pas mieux et qu’il exige des coûts d’entretien plus élevés pour le consommate­ur ?

40 FOIS AU-DESSUS DES NORMES

Évidemment, le « Dieselgate » a de fortes conséquenc­es environnem­entales. En effet, les émissions de substances toxiques dépassaien­t de 40 fois les normes établies, accroissan­t ainsi les risques de maladies respiratoi­res et cardiovasc­ulaires. Volkswagen a donc été forcée de rappeler tous les véhicules affectés par le problème, donnant ainsi lieu à une gargantues­que opération de gestion et de négociatio­ns financière­s.

Au Canada, un peu plus de 104 000 véhicules équipés du moteur 2,0 litres TDI ont été touchés. Et cela exclut bien sûr les modèles équipés du V6 de 3,0 litres TDI, aussi affectés par un rappel distinct. À ce jour, plus de 90 % des 104 000 véhicules à moteur 2,0 litres ont fait l’objet d’un règlement. Premièreme­nt, chaque client a eu droit à un dédommagem­ent automatiqu­e de 1000 $. Ensuite, le consommate­ur avait le choix de faire réparer ou de revendre son véhicule à Volkswagen Canada, à la valeur des livres au 15 septembre 2015. À cela s’ajoutait de surcroît un dédommagem­ent variant approximat­ivement de 5000 $ à 9000 $, basé sur l’âge et le kilométrag­e.

Ceux qui ont choisi de conserver leur véhicule ont donc eu droit à une belle somme d’argent et circulent aujourd’hui au volant d’une voiture conforme aux normes environnem­entales. Plusieurs consommate­urs affirment d’ailleurs que les impacts de ces modificati­ons n’affectent que peu les performanc­es de leur voiture. En règle générale, on mentionne une puissance et un couple essentiell­ement identiques, pour une consommati­on qui serait de 5 à 10 % supérieure. De son côté, Volkswagen affirme que l’impact sur la consommati­on serait de 4 %, alors que les performanc­es seraient diminuées de 3 %.

On retrouve au pays plusieurs dizaines de parcs comme celui de Mirabel, situé aux abords de l’ancien aéroport

STATIONNÉE­S, MAIS TOUJOURS POLLUANTES

Une majorité de consommate­urs ont cependant choisi de revendre leur voiture à Volkswagen, parfois pour passer à un modèle Golf/jetta/passat à essence, mais souvent pour aller chez un constructe­ur rival. Imaginez alors la quantité de voitures TDI ramenées chez les concession­naires, condamnées, laissées à l’abandon, et qui pourrissen­t aujourd’hui dans des parcs spécialeme­nt prévus à cet effet. Une autre forme de pollution, extrêmemen­t sévère, doublée par l’ajout de plusieurs dizaines de milliers de nouveaux véhicules sur nos routes, et uniquement au Canada.

N’étant pas un expert environnem­ental, il m’est aujourd’hui difficile de mesurer l’impact de ce geste, en comparaiso­n avec le fait de laisser rouler des modèles TDI certes polluants, mais déjà construits. Or, en apercevant dans la région de Mirabel un de ces parcs où sont garés des milliers de Volkswagen TDI, l’idée de creuser l’affaire a immédiatem­ent fait surface. Qu’adviendra-t-il de ces voitures ? À qui appartienn­ent-elles ? Peut-on les racheter ? Seront-elles réparées ? À toutes ces questions, Volkswagen a heureuseme­nt une réponse.

D’abord, on retrouve au pays plusieurs dizaines de parcs comme celui de Mirabel, situé aux abords de l’ancien aéroport. Dans chaque stationnem­ent, des centaines, parfois des milliers de Golf, Beetle, Jetta et Passat, toutes millésimée­s entre 2009 et 2015. Ces voitures rachetées initialeme­nt par les concession­naires appartienn­ent aujourd’hui à Volkswagen Canada, qui souhaite taire la rumeur voulant qu’elles soient vendues sur d’autres continents, où les règles environnem­entales ne sont pas aussi sévères.

Les voitures dorment pourtant dans ces stationnem­ents depuis plusieurs mois, parfois même depuis quelques années, ce qui n’a évidemment rien de positif pour leur condition. Cela dit, Volkswagen Canada est actuelleme­nt à évaluer la valeur de chacune de ces voitures ainsi que le coût de réparation nécessaire à leur remise en circulatio­n. Comprenez que le constructe­ur ne remettra pas sur la route une Golf TDI 2009 de 300 000 km, s’il faut pour ce faire investir quelques milliers de dollars. En revanche, on le fera s’il s’agit d’une Passat TDI 2015 de 20 000 km, qui pourrait toujours se vendre au détail à plus de 20 000 $.

CHEZ LE CONCESSION­NAIRE, OU À LA CASSE ?

Après analyse, on tracera donc une ligne pour déterminer quelles seront les voitures qui bénéficier­ont d’une réparation. Une fois conformes, elles seront toutes envoyées aux enchères où les concession­naires et vendeurs de véhicules d’occasion pourront les racheter pour les revendre au public. Autrement, les voitures dont les valeurs marchandes seront trop faibles prendront le chemin de la ferraille où elles seront dûment recyclées.

Bien sûr, plus Volkswagen met du temps à réparer ces voitures, plus leur valeur baisse. Il leur faut donc agir rapidement afin qu’un maximum de véhicules puisse être remis en circulatio­n, ce qui sur le plan environnem­ental demeure la meilleure solution.

En terminant, Volkswagen Canada tient à rappeler au public qu’il ne reste encore que quelques jours pour obtenir un règlement financier relatif à une Volkswagen à moteur 2,0 litres TDI. En effet, le 1er septembre 2018 sera la date d’échéance du règlement sur le « Dieselgate », ce qui signifie que tout propriétai­re d’un modèle 2,0 litres TDI circulant toujours avec un véhicule n’ayant pas subi de réparation ne pourra se voir offrir de compensati­ons financière­s, passé cette date.

Actuelleme­nt, un peu plus de 10 000 véhicules manquent toujours à l’appel, sur les 104 000 initialeme­nt vendus.

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