Le Journal de Quebec

Le pont de Québec dans un état lamentable

Les gouverneme­nts continuent malgré tout à se faire rassurants

- TAÏEB MOALLA

Un ingénieur s’inquiète de la solidité de la structure

Le pont de Québec ne résisterai­t probableme­nt pas à un gros tremblemen­t de terre, à une tempête de verglas ou à un dérailleme­nt de train, selon l’ingénieur à la retraite et architecte naval Jean Hémond.

« Le pont est en fin de vie. Combien il lui reste de temps ? On ne le sait pas. S’il arrive une catastroph­e comme une tempête de verglas, un tremblemen­t de terre de force 7 ou un accident de train ou de bateau, il est fort probable que le pont n’existera plus », a soutenu M. Hémond.

Ce dernier s’est fait connaître du grand public en avril 2017, après avoir pris des clichés alarmants de la rouille et des déformatio­ns de l’ouvrage patrimonia­l centenaire.

Jean Hémond admet qu’il y a eu plusieurs travaux correctifs du Canadien National (CN) et du ministère des Transports du Québec (MTQ), ces derniers mois, sur le pont. « Mais le pont est en train de tordre, a-t-il insisté. Il est rendu en phase plastique. Il n’y a plus de marge de sécurité. Ce pont est déformé. S’il était un être humain, je dirais qu’il a une arthrite déformante. Il faut le mettre à la retraite. »

D’ici là, pour réduire les risques, l’ingénieur suggère que les lourds trains de marchandis­es arrêtent de circuler sur le pont aux heures de pointe du trafic routier.

Par ailleurs, l’ingénieur ne comprend pas que le CN, propriétai­re du pont depuis 1993, ne rende pas publics ses rapports d’inspection de la structure.

SÉCURITAIR­E, DISENT LES AUTORITÉS

De leur côté, les deux paliers de gouverneme­nt se sont de nouveau voulus rassurants.

Au MTQ, le porte-parole Guillaume Paradis a soutenu que « le pont de Québec, sur lequel passent 35 000 véhicules chaque jour, est sécuritair­e. Quand on a des doutes sur la solidité ou la sécurité d’une structure, on n’hésite pas à poser les gestes nécessaire­s même s’ils sont impopulair­es (comme la fermeture de voies de circulatio­n) ».

Au cabinet du ministre des Transports du Canada, Marc Garneau, Delphine Denis a également signalé que « des experts techniques ont confirmé que la sécurité du pont de Québec n’a jamais été remise en question […] Transports Canada a rencontré la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN) à la mi-octobre 2017, et les renseignem­ents fournis au ministère étaient satisfaisa­nts à ce moment-là ».

LE PROPRIÉTAI­RE

Chez le CN, le porte-parole Jonathan Abecassis a juré que « le pont est sécuritair­e, sinon il serait fermé ».

Pourquoi ne pas rendre publics les rapports d’inspection de la structure réalisés par le CN ?

« Nous partageons les résultats de nos inspection­s avec les gouverneme­nts, et ces derniers peuvent procéder aux vérificati­ons qu’ils jugent nécessaire­s », a répondu M. Abecassis. — Avec la coll. de Jean-luc Lavallée

et de Patrick Bellerose

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 ?? PHOTOS COURTOISIE ?? 1. L’amorce « fort probable » d’une fissure sur une barre interne de l’ancrage nord-est. « De telles situations pourraient vraisembla­blement être découverte­s aux endroits exposés à la concentrat­ion des contrainte­s sur d’autres composante­s », estime Jean Hémond. 2. « Ici un voilage et une ouverture en portefeuil­le entre les rivets des tôles des quatre membrures en K, celles adjacentes aux poteaux principaux. Cette observatio­n porte à croire que la structure des membrures en K et les poteaux principaux plieraient sur le rebord du tablier routier rigide comme un coin de table », ajoute-t-il. 3. Des plaques de renforceme­nt ajoutées l’an dernier par le MTQ. 4. Deux travailleu­rs s’affairant à la réparation temporaire de la structure sur l’approche nord-est du pont. 4
PHOTOS COURTOISIE 1. L’amorce « fort probable » d’une fissure sur une barre interne de l’ancrage nord-est. « De telles situations pourraient vraisembla­blement être découverte­s aux endroits exposés à la concentrat­ion des contrainte­s sur d’autres composante­s », estime Jean Hémond. 2. « Ici un voilage et une ouverture en portefeuil­le entre les rivets des tôles des quatre membrures en K, celles adjacentes aux poteaux principaux. Cette observatio­n porte à croire que la structure des membrures en K et les poteaux principaux plieraient sur le rebord du tablier routier rigide comme un coin de table », ajoute-t-il. 3. Des plaques de renforceme­nt ajoutées l’an dernier par le MTQ. 4. Deux travailleu­rs s’affairant à la réparation temporaire de la structure sur l’approche nord-est du pont. 4

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