Le Journal de Quebec

Quand Justin Trudeau vire fou

- MATHIEU BOCK-CÔTÉ mathieu.bock-cote@quebecorme­dia.com

La scène se passe il y a quelques jours dans un rassemblem­ent libéral sur la Rive-sud de Montréal. Justin Trudeau y harangue ses troupes, quand soudain, une dame de la foule, qui s’est présentée sans invitation, on le comprend, lui pose une question.

Avec un désagréabl­e surplus d’agressivit­é, il faut bien le dire, et une hargne qui ne l’honore pas, elle demande, quand le gouverneme­nt Trudeau remettra-t-il au Québec les millions qu’il lui doit suite à la crise de l’immigratio­n illégale qui a marqué l’été 2017 ?

INSULTES

C’est à ce moment que Justin Trudeau perd un écrou et vire fou. Il se met alors à invectiver la femme en la traitant de raciste et en rajoutant qu’elle n’a pas sa place au Canada. Il hurle, il gueule et la foule, naturellem­ent, s’empresse de l’applaudir. Elle se laisse aller au doux plaisir du lynchage. Elle rêve manifestem­ent d’en finir avec le chien galeux qui s’est infiltré parmi eux.

Et jamais, le premier ministre et ses fidèles ne doutent de leur bon droit.

Reconstrui­sons le raisonneme­nt de la tirade improvisée du premier ministre : les immigrés illégaux, qui entrent au Canada sans permission et sans respecter ses règles d’admission, sont les bienvenus au Canada, mais les Canadiens qui remettent en question l’immigratio­n illégale sont désormais des indésirabl­es. En d’autres mots, il suffit de franchir la frontière sans en avoir le droit pour devenir Canadien mais il suffit de rappeler que cette frontière devrait être respectée pour ne plus être digne de l’être. C’est très fort. On retrouve là un bon exemple du paradoxe politique dominant de notre époque : c’est au nom de la tolérance qu’on pratique l’intoléranc­e. Ceux qui croient incarner la vertu sont à ce point convaincus d’avoir le monopole du vrai, du bien et du coeur qu’ils se croient tout permis.

Devant eux, ils ne voient pas des citoyens en désaccord avec leur vision du monde, mais des monstres, ennemis de l’humanité, qu’il faut faire taire et chasser de la vie publique. Leur vision serait à ce point inadmissib­le qu’on se fera une fierté d’être intolérant avec eux en leur collant les étiquettes les plus détestable­s.

On tirera néanmoins une leçon de cet épisode loufoque – ils ne manquent pas, en Trudeaulan­d.

Autrefois, pour être raciste, il fallait croire en l’inégalité des « races » et vouloir organiser la société à partir de cette hiérarchie fantasmée.

Ensuite, les antiracist­es profession­nels ont étendu la significat­ion de ce terme. Pour être raciste, il suffisait de constater que toutes les cultures ne sont pas faites pour cohabiter.

Puis ils l’ont encore étendu : il suffisait de critiquer l’immigratio­n massive et de vouloir la réduire significat­ivement pour être raciste.

RACISME ?

Maintenant, il suffit apparemmen­t de critiquer l’immigratio­n illégale et de demander au gouverneme­nt fédéral d’assumer ses responsabi­lités financière­s dans le dossier pour devenir raciste. Conclusion possible : les mots ne veulent plus rien dire. Conclusion alternativ­e : Justin Trudeau devrait s’acheter un dictionnai­re pour connaître le sens des mots qu’il utilise avant d’engueuler une prochaine citoyenne.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada