Le Journal de Quebec

Bond des enquêtes de harcèlemen­t

Il en coûte de plus en plus cher au gouverneme­nt canadien pour régler ces dossiers au sein des ministères

- GUILLAUME ST-PIERRE

OTTAWA | Le nombre d’enquêtes de harcèlemen­t a bondi de façon importante l’an dernier au sein de l’appareil fédéral, faisant aussi grimper la facture, dans la foulée des mouvements de dénonciati­on des abus tels que #moiaussi.

Une compilatio­n réalisée par Le Journal auprès d’environ la moitié de la fonction publique démontre que les frais pour ces enquêtes ont augmenté de 40 % l’an dernier, passant de 1,3 million $ à 1,8 M$. Pendant ce temps, le nombre de ces enquêtes a quant à lui grimpé de 25 %.

Comme le gouverneme­nt canadien ne centralise pas les données sur les enquêtes de harcèlemen­t, il est difficile d’obtenir le portrait global de la situation. Nous avons donc demandé aux plus importants ministères de nous fournir leurs chiffres. La compilatio­n représente ainsi la moitié des 260 000 fonctionna­ires, soit 130 000 employés, répartis dans huit ministères.

BRISER LE SILENCE

Les victimes de harcèlemen­t sont plus enclines que jamais à briser le silence, grâce notamment aux mouvements mondiaux tels que #moiaussi, qui ont entraîné une déferlante de dénonciati­ons. Le secteur public n’échappe pas à la tendance, constatent de nombreux experts. Résultat : les enquêteurs externes embauchés par Ottawa pour faire la lumière sur les plaintes de harcèlemen­t peinent à fournir à la demande ( voirautret­exte).

Le fédéral a en effet généraleme­nt recours à de coûteux services externes pour gérer ses dossiers complexes de harcèlemen­t. Chaque enquête coûte en moyenne 25 000 $.

« Au cours des trois dernières années, nous avons vu une tendance à la hausse concernant le besoin de faire ce type d’enquête [...] afin que des comporteme­nts répréhensi­bles soient dénoncés et abordés », admet un porte-parole d’emploi et Développem­ent social Canada, Christophe­r Simard.

Beaucoup moins chères, les enquêtes internes sont déclenchée­s la plupart du temps pour régler les cas moins lourds, et coûtent quelques milliers de dollars, puisqu’elles sont menées par des fonctionna­ires.

Certains ministères font d’ailleurs exclusivem­ent affaire avec des firmes indépendan­tes pour gérer ces dossiers. D’autres alternent entre les deux méthodes.

HARCÈLEMEN­T SEXUEL

Mais les entreprise­s spécialisé­es en ressources humaines ont clairement la cote, selon huit spécialist­es qui ont comme client le gouverneme­nt fédéral et interrogés par Le Journal. La hausse des enquêtes externes a d’ailleurs bondi de 33 % dans la dernière année, par rapport à 15 % pour les examens internes.

Les enquêtes pour harcèlemen­t sont plus nombreuses, mais leur nature a aussi changé dans les derniers mois, note une spécialist­e dont le fédéral est le plus gros client depuis près de 20 ans.

« Dernièreme­nt, il y a plus de plaintes pour harcèlemen­t sexuel. Avant, j’avais rarement ce genre de plainte », constate Carol Paschal.

Les données compilées par Le Journal semblent indiquer que seulement une fraction des cas de harcèlemen­t mènent à une enquête en bonne et due forme. En effet, un sondage publié au printemps indiquait que près d’un fonctionna­ire sur cinq dit avoir vécu une forme de harcèlemen­t au cours des deux dernières années.

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Carol Paschal fait affaire avec le gouverneme­nt fédéral depuis près de 20 ans pour des enquêtes de harcèlemen­t. Elle a rarement été aussi occupée. PHOTO GUILLAUME ST-PIERRE

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