Le Journal de Quebec

PQ : étranger dans sa propre maison

- JOSEPH FACAL joseph.facal@quebecorme­dia.com

Jean-françois Lisée a reçu une lettre dont l’auteur a eu la gentilless­e de m’envoyer une copie.

Je vous en parle parce que je suis sûr que des dizaines de milliers de gens pensent comme cet homme, dont moi.

À mon humble avis, le chef péquiste fait une excellente campagne : il est énergique, vif, allumé, ce qui n’étonne pas quand on le connaît. Il est partout, tout en n’étant nulle part sur l’essentiel. C’est aussi ce que dit cette lettre.

MALAISE

L’auteur est un fervent admirateur de M. Lisée : il a, dit-il, lu tous ses livres, échangé avec lui, repris sa carte du PQ à cause de lui, et le considère comme un de nos hommes publics les plus intelligen­ts, ce qui est indiscutab­le.

Et pourtant, dit-il, je ne voterai pas pour vous. Il expose ensuite son malaise.

Le PQ était jadis une coalition gauche-droite. Il n’est plus qu’un parti de gauche.

Le flirt avec l’extrême gauche de QS – qui, tel un « vautour », dit-il, n’attend que le moment de fondre sur ses restes – l’a sidéré.

Cet homme, qui se définit comme un nationalis­te modéré, un tantinet conservate­ur, ne reconnaît plus sa maison.

De quoi lui parle « son » chef ? Des lunchs à l’école et de covoiturag­e.

À défaut de souveraine­té dans l’immédiat, où sont les raisons essentiell­es, existentie­lles pour un nationalis­te de voter pour le PQ ?

Où sont les idées fortes sur l’immigratio­n, la laïcité, la langue, l’identité ?

Le PQ joue au gentil parti progressis­te 2.0, branché sur les milléniaux, « givré », « full cool », faisant une fausse lecture de l’épisode de la charte des valeurs, tétanisé par la peur d’être accusé de ne pas être « ouvert ».

Le PQ perd son âme, dit-il. On ne le reconnaît plus. La défense inspirée de la gestion de l’offre fut un cadeau des circonstan­ces.

Vous auriez tort de croire que ce monsieur est un baby-boomer de 70 ans, nostalgiqu­e de Jacques Parizeau.

Il a 40 ans et s’estime assez représenta­tif de ces gens qui habitent le 450 ou le 418 – aujourd’hui des terres « caquistes » –, et qui étaient la clientèle naturelle du PQ lors de sa dernière victoire majoritair­e, quand il obtint… 43 % des votes… en 1998.

Je fais partie, dit-il, de ceux que vous devez convaincre, mais vous ne me parlez plus...

Où sont les raisons essentiell­es, existentie­lles pour un nationalis­te de voter pour le PQ ?

ÉGARÉS ?

Comment lui donner tort ? Comment ne pas avoir le sentiment que cette campagne sans aspérités, qui sent la lavande et le patchouli, semble viser ceux que Richard Martineau appelle « les petits lapins » ?

En début de campagne, M. Lisée a lancé un appel aux souveraini­stes « égarés ». Plus rien depuis.

Et si ces gens étaient restés les mêmes ? Et si c’était plutôt le PQ qui s’était égaré ?

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada