Le Journal de Quebec

Une jeunesse fédéralist­e ?

- MATHIEU BOCK-CÔTÉ e Blogueur au Journal Sociologue, auteur et chroniqueu­r mathieu.bock-cote @quebecorme­dia.com @mbockcote

La Presse publiait récemment un sondage nous « révélant », encore une fois, que la jeune génération, et plus spécialeme­nt les 18-25 ans, est globalemen­t hostile ou indifféren­te à l’indépendan­ce. Dans le cadre de cette élection, elle est absente de leurs préoccupat­ions.

SOUVERAINE­TÉ

De même, les jeunes sont béatement optimistes quant à l’avenir du français et systématiq­uement favorables au multicultu­ralisme. Loin de s’inquiéter du sort des Québécois francophon­es, ils s’inquiètent plutôt de celui des « minorités », et les imaginent discriminé­es. Même les anglos seraient discriminé­s au Québec !

Sans surprise, ces données étaient présentées par La Presse de manière triomphali­ste, comme si la jeunesse faisait preuve d’une lucidité supérieure et liquidait les vieilles querelles des génération­s précédente­s.

Cherchons plutôt à comprendre cette indifféren­ce.

La jeune génération est née à la politique dans un Québec où l’idée d’indépendan­ce était en déroute et les souveraini­stes présentés comme des perdants. Nous étions occupés non pas à résoudre la question nationale, mais à la liquider. Ces jeunes sont les enfants de la défaite référendai­re. Ils nous rappellent malgré eux qu’un peuple n’échoue pas son indépendan­ce sans être dérouté psychologi­quement et abîmé culturelle­ment.

Plus personne ne critiquait sérieuseme­nt le régime canadien : on préférait vivre dans l’illusion toxique, mais puissante, d’un Québec qui serait presque déjà souverain et où l’avenir du français serait assuré.

DÉRACINEME­NT

La nouvelle génération est née dans un monde qui diabolise l’identité nationale en l’associant à la xénophobie.

À l’école comme dans les médias, elle a été la cible d’une propagande visant à lui inculquer une mauvaise conscience.

Lorsqu’elle pense à l’histoire, elle pense moins à la subordinat­ion dont a été victime le peuple québécois et à sa fragilité identitair­e, qu’elle l’imagine dans le rôle imaginaire du bourreau persécutan­t les Amérindien­s.

La jeune génération n’est pas éclairée : elle est tentée par le néant politique. Ne la blâmons pas, mais plaignons-la, et réenracino­ns-la.

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