Elle trouve l’amour en réadaptation
Après avoir frôlé la mort et perdu ses deux bras et deux jambes, Sabryna Mongeon a trouvé l’amour où elle s’y attendait le moins. Une histoire « digne d’un film » qui la motive à abattre toutes les barrières qui se dressent devant ses rêves.
« J’ai toujours trouvé que c’était cliché de se faire dire qu’on va trouver l’amour quand on s’y attend le moins, mais c’est en plein ça […] et c’est merveilleux », rigole la courageuse jeune femme de 19 ans.
Sortie de six mois difficiles de réadaptation depuis deux semaines, Sabryna apprivoise tranquillement sa nouvelle vie de quadruple amputée chez son père à Laval.
Son accident le soir du réveillon de Noël a secoué tout le Québec. Rentrant chez elle en soirée, elle a fait une sortie de route en négociant une courbe et embouti un poteau d’électricité.
Elle a été électrocutée en sortant de son véhicule, son pied droit explosant sous l’impulsion. Inconsciente près de six heures dans le froid, son corps était en hypothermie quand un bon samaritain l’a trouvée et alerté les secours.
Elle est restée deux mois aux soins intensifs du CHUM, subissant pas moins de 10 amputations lui faisant perdre ses deux jambes et ses deux avantbras. « Chaque soir, je pensais mourir », dit-elle, se rappelant les intenses douleurs et les cauchemars qui l’assaillaient, impuissante dans son lit.
FONDER UNE FAMILLE
Mais elle n’a jamais perdu le goût de vivre et de se battre pour ses rêves. L’une de ses premières questions au médecin en se réveillant du coma était de savoir si elle pourrait avoir des enfants. À son plus grand soulagement, la réponse est oui.
Une fois sortis de l’hôpital, six mois de réadaptation l’attendaient. « J’ai frappé un mur », reconnaît-elle. Sabryna Mongeon ignorait tout des prothèses et croyait à tort qu’elles remplaceraient aisément ses membres perdus.
« Juste marcher, ça prend deux fois plus d’efforts et après une demi-heure je sue de partout », dit-elle. Même si c’est dur, rien ne bat le sentiment de se tenir debout. « Tu te sens toi-même », souffle-t-elle.
C’est en réadaptation à l’institut Gingras-lindsay-de-montréal qu’elle est tombée en amour avec Jonathan. Militaire atteint d’une maladie auto-immune qui l’empêchait de marcher, ils se sont rapprochés en passant des soirées à l’extérieur à discuter.
Un soir, ils ont collé leur fauteuil roulant, et ils se sont embrassés. « Le lendemain, Jonathan s’est remis à marcher », confie sa copine les yeux brillants. Incapable de marcher pendant quelques mois, son copain a aujourd’hui retrouvé la forme et son travail.
Trouver l’amour n’avait « jamais effleuré l’esprit » de Sabryna Mongeon. « J’étais surprise qu’il veuille s’attacher à moi dans l’état que j’étais », confie-t-elle.
« Mais ça m’a évité de me poser des questions, comme si j’allais encore plaire à quelqu’un un jour », ajoute la jeune femme.
Ensemble depuis quatre mois, Sabryna Mongeon dit avoir trouvé un homme attentif qui est toujours là pour la rassurer. Car certains doutes tourmentent toujours la jeune femme qui rêve d’autonomie et d’indépendance.
« Je n’ai pas envie de passer le reste de ma vie avec quelqu’un qui vient aux toilettes avec moi », dit-elle. « Perdre mes membres ça a été quelque chose, mais ce qui me rendait le plus triste. c’était de me demander si je pourrais m’occuper d’un enfant et faire à souper »
« Et ce n’est pas acquis aujourd’hui », reconnaît celle qui n’a cependant pas l’intention d’abandonner.
UN JOUR À LA FOIS
Pour l’instant, elle s’accroche aux petits plaisirs, comme celui de pouvoir manger toute seule depuis qu’elle a un bras mécanique.
« C’est un gros privilège de manger chaud, de manger à ton rythme et l’aliment que tu veux en premier dans ton assiette », dit-elle en souriant.
Le plus difficile pour elle jusqu’à maintenant a été de se rendre dans les boutiques et d’y voir des vêtements qu’elle aime, mais qu’elle ne pourra plus jamais porter.
Elle a dit adieu à sa collection de souliers à talons hauts ou de sandales, dont elle a fait don à sa soeur aînée.
Sabryna Mongeon a encore deux grands projets qui l’attendent. La semaine prochaine, elle fera un premier voyage en Gaspésie avec son copain. Ils partiront en voiture avec un petit fauteuil roulant et ses prothèses.
Puis, elle s’est acheté une maison à Laval avec les quelque 200 000 $ de la campagne de sociofinancement lancée après son accident. Elle espère maintenant obtenir l’aide d’entrepreneurs locaux pour adapter sa maison.