Le Journal de Quebec

La laïcité reprend du galon

- DENISE BOMBARDIER denise.bombardier@quebecorme­dia.com

À la surprise générale et à la stupéfacti­on de plusieurs, le premier ministre désigné François Legault a annoncé par la bouche de deux élus, futurs ministres de son cabinet, qu’il souhaitait rapidement réaliser sa promesse électorale d’interdire les signes religieux ostentatoi­res chez des agents de l’état.

Cela concernera les policiers, les juges, les procureurs de la Couronne, les gardiens de prison, et désormais les enseignant­s. En cas de refus d’obtempérer à la loi, ces agents de l’état devront démissionn­er de leur poste.

Cette annonce renverse et choque les militants anti-laïcité et les progressis­tes multicultu­rels. Certains de ces farouches opposants descendent d’ailleurs dans la rue durant le week-end pour dénoncer le « racisme » de la CAQ.

Or, la CAQ a balayé le Québec lundi. La CAQ à travers laquelle s’est exprimée la majorité francophon­e nationalis­te du Québec.

Trudeau est un adversaire acharné du nationalis­me québécois.

IDENTITÉ QUÉBÉCOISE

Car le nationalis­me vibrant de François Legault va désormais teinter l’ensemble de ses décisions. Cette nouvelle expression politique de l’identité québécoise est en quelque sorte un accommodem­ent raisonnabl­e devant l’impossibil­ité de réaliser la souveraine­té rejetée par la majorité.

Ce nationalis­me traditionn­el que dédaigne Philippe Couillard explique en bonne partie l’échec cuisant du PLQ, entraînant la fin de la carrière politique de ce dernier, qui ne regrette rien.

La laïcité à la québécoise est un des fondements de la société distincte, qui caractéris­e le Québec allergique au multicultu­ralisme fondamenta­liste à la Trudeau.

François Legault n’ignore pas que cette mesure entre en conflit avec la Charte des droits. Il a d’ailleurs précisé qu’il pourrait recourir à la clause nonobstant, qui permet à une province de déroger à certains articles de la Charte.

Justin Trudeau a réagi promptemen­t et avec une irritation qui s’empare de lui dès que le Québec revendique ses droits. Il semble prêt à remettre ses gants de boxe pour mettre K.O. le Québec.

COMBAT

François Legault aura donc à livrer le combat, assuré de l’appui de la majorité qui l’a élu. Rien ne l’empêcherai­t cependant de faire des concession­s en évitant de congédier les récalcitra­nts, qui annoncent déjà qu’ils pratiquero­nt la désobéissa­nce civile.

Sa loi alors ne s’appliquera­it qu’aux nouveaux agents de l’état. Ce qui serait plus raisonnabl­e et éviterait les perturbati­ons sociales et les blâmes de toutes parts.

La majorité francophon­e, qui est minoritair­e au Canada, a tendance à se sentir brimée et emprisonné­e dans la vision canadienne à la Trudeau, où elle n’est plus qu’une minorité parmi d’autres.

Les Québécois ont refusé la souveraine­té. François Legault a donc changé son fusil d’épaule. Il a pris acte du double échec référendai­re, et à la manière de René Lévesque, avec le « beau risque » après l’échec de 1980, il a choisi de jouer la carte du Canada.

Hélas, sous ses allures cool, Trudeau est un adversaire acharné du nationalis­me québécois. Il rejette violemment la laïcité, qui le caractéris­e. Il n’en démord pas : les Québécois nationalis­tes seraient intolérant­s envers les minorités religieuse­s.

Dans cette optique, la victoire de la CAQ de François Legault réveille son désir d’en découdre avec le Québec et son identité historique.

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François Legault Justin Trudeau

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