Le Journal de Quebec

Péréquatio­n « zéro », mission impossible

- MICHEL GIRARD michel.girard@quebecorme­dia.com

Est-ce réaliste de croire qu’un gouverneme­nt caquiste réussira à enrichir le Québec au point de se passer des 11 à 14 milliards de dollars de péréquatio­n que lui versera annuelleme­nt le fédéral d’ici 2022-23 ?

En cette année financière 2018-19, Québec va recevoir la rondelette somme de 11,7 milliards de dollars de péréquatio­n, lequel programme fédéral permet d’équilibrer la richesse des provinces en vue de leur donner des revenus suffisants pour assurer les services publics.

C’est nous, au Québec, qui recevons la plus grosse part de ce gâteau fédéral, soit 61,9 % de la péréquatio­n totale versée aux provinces et territoire­s.

Le nouveau premier ministre, François Legault, trouve que ça n’a pas de bon sens d’être ainsi à la remorque des provinces qualifiées de « riches » en vertu du calcul de la péréquatio­n, telles que l’alberta, la Saskatchew­an, la Colombie-britanniqu­e, Terre-neuve-et-labrador.

Lors de la mise à jour budgétaire de novembre 2017, le chef caquiste avait dénoncé avec force la dépendance du Québec envers la péréquatio­n fédérale. Il avait interpellé l’ex-premier ministre Philippe Couillard en affirmant qu’un gouverneme­nt de la CAQ « va viser la péréquatio­n zéro » en éliminant l’écart de richesse avec le reste du Canada. « Un gouverneme­nt de la CAQ va avoir de l’ambition, va voir grand pour le Québec. »

MAINTENANT

François Legault est maintenant au pouvoir.

Pour renoncer à la péréquatio­n, par exemple, il lui faudrait aller chercher en impôts et taxes supplément­aires les 11,7 milliards de dollars que va rapporter cette année (2018-19) la péréquatio­n fédérale.

Concrèteme­nt, juste pour cette année, il faudrait que le PIB bondisse du jour au lendemain d’environ 72 milliards de dollars, soit de 16,8 %, pour pouvoir encaisser le supplément d’impôts et de taxes requis pour compenser la péréquatio­n.

Une telle croissance équivaut à celle que le PIB du Québec a enregistré­e au cours des six dernières années.

Est-ce possible de stimuler la croissance économique québécoise à ce point ? Absolument pas !

CALCULETTE MAGIQUE

Je me demande d’ailleurs quelle sorte de calculette magique a utilisée François Legault pour affirmer avec conviction qu’il lui était possible d’enrichir le Québec de la sorte.

Sa déclaratio­n de renoncer à la péréquatio­n fédérale est d’autant irréaliste que nulle part dans son cadre financier électoral de 2019 à 2022 on ne retrouve la moindre allusion à une quelconque réduction de la péréquatio­n fédérale.

Pour défrayer le coût de ses engagement­s financiers sans toucher aux surplus prévus dans le Rapport préélector­al de la vérificatr­ice générale, la CAQ mise seulement sur des « mesures d’optimisati­on » des dépenses et une croissance économique de 0,5 % de plus que prévue pour chacune des deux dernières années.

Ainsi, un gouverneme­nt de la CAQ prévoit avoir pour effet économique d’accélérer la croissance du PIB d’un demi-point de pourcentag­e (0,5 %) dans les deux dernières années 202122 et 2022-23.

Et dire que le PIB doit grimper de 16,8 % de plus que prévu pour pouvoir permettre au Québec de s’enrichir en vue de renoncer à la péréquatio­n…

Pas sûr que François Legault va vouloir reparler de sitôt de la péréquatio­n « zéro » !

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