C’est un message « décevant » qui est envoyé aux victimes
Dénoncer Bertrand Charest a toutefois fait bouger les choses selon plusieurs
Le fait que la Couronne concède de laisser tomber des accusations de crimes sexuels contre l’ancien entraîneur de ski alpin Bertrand Charest envoie un triste message aux victimes, croit un organisme venant en aide à celles-ci.
« Ce n’est pas très encourageant pour les victimes, affirme la porte-parole du Regroupement québécois des centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (RQCALACS), Stéphanie Tremblay. Ça permet de comprendre pourquoi beaucoup de survivantes ne vont pas porter plainte. »
La représentante du RQCALACS réagissait aux concessions faites en appel par la Couronne dans le dossier de Bertrand Charest.
Charest, 53 ans, est un ex- coach de ski alpin reconnu coupable d’abus sexuels sur neuf athlètes adolescentes dont il avait la responsabilité, dans les années 1990.
Lors de voyages d’équipe, il avait utilisé son ascendant sur elles pour commettre ses crimes, qui sont restés sous silence pendant plus d’une décennie.
Au terme de son procès, il avait été reconnu coupable de 37 accusations et condamné à 12 ans de pénitencier. Ses avocats Louis Belleau et Antonio Cabral ont porté le verdict en appel en réclamant soit l’acquittement, soit un nouveau procès, notamment parce que leur client affirme ne pas être un prédateur sexuel comme l’avait décrit le juge.
C’est la Cour d’appel qui aura ultimement le dernier mot sur le sort de Charest.
SITUATION « DÉCEVANTE »
Mais si la Couronne soutient que 17 accusations doivent être maintenues, elle concède que le verdict devrait être renversé sur les autres chefs.
« La situation est décevante », affirme Mme Tremblay.
Cette dernière rappelle que, déjà, la majorité des victimes de crimes sexuels n’osent pas dénoncer et encore moins quand elles voient le chemin à parcourir.
« À chacune de ces situations, beaucoup de survivantes revivent [les crimes qu’elles ont vécus], explique Mme Trem- blay. Mais chaque personne vit les choses différemment. Il y en a qui se disent que, malgré tout, ça va en encourager d’autres à dénoncer. »
FAIRE BOUGER LES CHOSES
Point positif : même si la Cour d’appel accueille toutes les conclusions recommandées par la Couronne, le nombre de victimes ne changera pas.
« Il y a eu beaucoup d’appuis envers les survivantes, ajoutet-elle. Et des organisations sportives ont remis en question leurs procédures, afin d’assurer la sécurité des jeunes. Ça reste que c’est dommage, parce que le verdict initial a eu beaucoup d’impact. »
L’ex-skieur olympique Jean-luc Brassard abonde dans le même sens en soulignant que grâce aux victimes, les choses ont changé.
« L’aspect judiciaire ne change rien sur le mal qu’a fait Bertrand Charest, dit le médaillé olympique. Les filles qui ont dénoncé ont fait bouger les choses, elles ont accompli ce que peu de gens feraient. Il faut leur dire merci. »