Un « incident hideux », dit le prince héritier
Mohammed ben Salmane s’exprime publiquement pour la première fois depuis le meurtre du journaliste
RIYAD | (AFP) Le prince héritier d’arabie saoudite Mohammed ben Salmane a qualifié hier d’« incident hideux » le meurtre du journaliste et opposant Jamal Khashoggi, sa première réaction publique à cette affaire qui provoque un tollé international et écorne l’image du royaume saoudien.
S’exprimant devant un forum international d’investissement à Riyad, l’héritier du trône du premier exportateur de pétrole au monde a également affirmé que « la justice prévaudra » dans cette affaire et qu’il n’y aurait « pas de rupture des liens avec la Turquie ».
Jamal Khashoggi a été tué au consulat saoudien à Istanbul, où il s’était rendu le 2 octobre pour des formalités administratives.
PLUSIEURS VERSIONS
Après avoir nié sa mort, Riyad, sous la pression internationale, a avancé plusieurs versions évoquant un temps une « rixe » ayant mal tourné, puis affirmant que le meurtre avait été commis lors d’une opération « non autorisée » et dont le prince héritier, considéré comme l’homme fort du royaume, n’avait pas été informé.
Mais les explications saoudiennes n’ont guère convaincu et les Occidentaux, sceptiques, ont réclamé une enquête « crédible et transparente ».
Lors d’une conversation téléphonique hier avec le roi Salmane, la première ministre britannique Theresa May a « exhorté l’arabie saoudite à coopérer avec l’enquête turque et à être transpa- rente sur ses résultats », soulignant que « les explications actuelles manquaient de crédibilité ».
« L’incident est très douloureux pour tous les Saoudiens. C’est un incident hideux et totalement injustifiable », a estimé le prince Mohammed ben Salmane, 33 ans, lors de sa première intervention publique depuis le meurtre de Jamal Khashoggi, qualifié « d’assassinat politique » planifié par le président turc Recep Tayyip Erdogan. « Beaucoup essayent d’exploiter l’affaire Khashoggi pour créer un antagonisme entre l’arabie saoudite et la Turquie, mais ils ne réussiront pas », a ajouté le prince héritier, qui a eu un entretien téléphonique mercredi avec M. Erdogan, le premier depuis le début de l’affaire.
MEURTRE MACABRE
La presse turque a publié des détails macabres sur le meurtre de ce collaborateur du Washington Post. Mais si les médias ont mis en cause Mohammed ben Salmane, M. Erdogan s’est jusqu’à présent gardé de l’accuser directement.
Riyad a annoncé des arrestations et des limogeages, et affirmé que toutes les personnes impliquées rendraient des comptes.
Sur les réformes engagées dans le royaume, le prince héritier a affirmé que « dans les cinq prochaines années, l’arabie saoudite sera totalement différente ».
« Si nous réussissons dans les cinq années à venir, d’autres pays [de la région] nous suivront », a-t-il dit. « C’est la bataille des Saoudiens et c’est ma bataille dans laquelle je suis engagé personnellement. »