Le Journal de Quebec

Un grand patriote

- MATHIEU BOCK-CÔTÉ mathieu.bock-cote @quebecorme­dia.com

On s’y attendait, et hier, c’est arrivé : à 81 ans, Bernard Landry vient de nous quitter. On le savait très malade et, comme toujours dans de tels moments, on espérait qu’il en avait encore pour quelques mois au moins. En fait, c’était une affaire de semaines.

Comme des centaines de milliers de Québécois, je ressens une peine immense. Je pleure la fin d’une époque qu’il aura incarnée. Je pleure un grand homme, un patriote. Mais je pleure aussi tout simplement un homme, d’une qualité humaine remarquabl­e, que j’aimais énormément.

ADMIRABLE

Je connaissai­s Monsieur Landry depuis longtemps. Très jeune, je l’ai rencontré, et j’ai eu la chance, de 2003 à 2004, de travailler à son cabinet, à l’opposition officielle.

J’étais un de ses rédacteurs de discours, et je me rappelle encore ma fierté lorsque, pour la première fois, je l’ai entendu prononcer le texte que je lui avais écrit. Au fil des ans, nous nous sommes fréquemmen­t croisés, souvent pour dîner, toujours en parlant de notre passion commune du Québec, que nous souhaition­s libre.

On connaît le personnage. Bernard Landry voulait l’indépendan­ce nationale pour une raison simple : avoir un pays est une question d’honneur et de liberté.

Mais il savait aussi se faire grand pédagogue, en liant l’économie et la souveraine­té. Il conjuguait une parole lyrique et un vrai réalisme dans la conduite des affaires de l’état. Il aimait le Québec charnellem­ent, non pas à la manière d’une société abstraite, mais d’un pays qui touchait sa part la plus intime. Il lui aura consacré sa vie.

Il y a quelques semaines à peine, à la mi-octobre, j’ai eu le bonheur de partager un dernier repas avec Monsieur Landry, à sa maison à Verchères, en compagnie de son épouse, de ma compagne et d’un de ses vieux amis. Je savais bien, en quittant sa maison, que c’était probableme­nt la dernière fois que je le voyais. Il mangeait peu, il respirait difficilem­ent, et pourtant, je ne crois pas me tromper en disant qu’il semblait heureux. Peut-être s’agissait-il du sentiment du devoir accompli ? C’était une magnifique soirée où nous avons parlé de la grande cause qui a traversé son existence.

Il était étonnammen­t optimiste. La présente situation, qui semble difficile aux souveraini­stes, ne le désespérai­t pas. Au fond de lui-même, il était persuadé que notre peuple, un jour, aurait le courage d’embrasser son destin.

Le combat pour l’indépendan­ce traverse notre histoire depuis plus de deux siècles.

Chaque génération fait ce qu’elle peut. Certaines doivent rallumer la flamme, d’autres la garder vivante dans des temps difficiles. Celle de Bernard Landry a cru le temps venu de la grande offensive. Ils sont passés à deux doigts de réussir cette belle entreprise.

Une nouvelle époque commence. Il faut rebâtir. Son souvenir nous inspirera. Bernard Landry aura permis à plusieurs d’entendre l’appel de la patrie.

Je l’ai écrit dans nos pages récemment : le jour de l’indépendan­ce, on verra en lui l’une des grandes figures qui aura permis à notre peuple de venir au monde.

Un grand patriote vient de nous quitter.

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