Le Journal de Quebec

Harcelé par 1500 textos de son ex en 2 mois

Il raconte la difficulté de trouver de l’aide pour les hommes victimes

- AMÉLIE ST-YVES

DRUMMONDVI­LLE | Un homme qui a vécu du harcèlemen­t extrême par son ex-conjointe déplore le manque de service pour les hommes en difficulté, lui qui dit avoir tenté de porter plainte à plusieurs reprises.

Léopold Stéphane Lévesque pleure en racontant le moment où son ex-conjointe, Isabelle St-louis, a finalement été reconnue coupable de harcèlemen­t et de menaces de mort à son endroit, le 17 septembre dernier.

Ça lui a pris beaucoup de courage pour dénoncer son ex-conjointe, avec qui il était depuis 28 ans.

Il a d’ailleurs été touché que la juge Marie-josée Ménard souligne à quel point c’est difficile pour un homme de porter plainte et témoigner contre une femme dans un contexte de violence conjugale.

Il estime d’ailleurs qu’on ne l’aurait sûrement pas cru s’il n’avait pas eu de preuves dans son cellulaire.

« Si je n’avais pas eu les textos, je n’aurais pas pu le prouver. Un homme maltraité par une femme au Québec, ça n’existe pas », dit l’homme de 47 ans.

Il affirme avoir tenté à quelques reprises de dénoncer son ex-femme à la police pour violence conjugale, dans le passé, mais qu’on ne l’a pas cru.

« Si j’avais été une femme, et elle un homme, on l’aurait arrêté tout de suite », croit-il.

Mme St-louis a été reconnue coupable de harcèlemen­t et de menaces de mort après un procès pour des événements qui se sont produits après leur séparation.

Elle recevra sa sentence demain, au Palais de justice de Drummondvi­lle.

ARGENT DANS UN LIVRE DE CUISINE

Léopold Stéphane Lévesque a planifié longtemps à l’avance son départ du domicile familial de Saint-rémi, en Montérégie, à la fin juillet 2016.

Cela faisait un moment qu’il y songeait, mais indique que sa conjointe contrôlait ses finances.

Il a mis quelques semaines à accumuler 20 $. Il pouvait mettre de la monnaie de côté quand les enfants revenaient avec du change. Il a même dû ramasser des bouteilles et aller les échanger au dépanneur pour réussir à partir, selon lui.

Quand il avait quelques dollars en monnaie, il allait au dépanneur le faire changer en argent papier, parce que cela se cachait mieux dans un livre de cuisine. Il avait choisi cette cachette, car il ne fallait pas que son ex-femme découvre cet argent dans ses poches ou son portefeuil­le. Elle l’aurait pris, affirme-t-il.

Il raconte que le matin de son départ, il a serré ses trois garçons dans ses bras, puis est allé prier à l’église plutôt que de se diriger au travail, en attendant que sa conjointe parte pour la journée.

Il est revenu à vélo, a mis quelques vêtements et quelques livres dans un sac et une boîte, et a appelé un taxi qu’il a payé avec le 20 $. Il est parti de Saint-rémi et s’est rendu à la Maison sous les arbres, de Châteaugua­y, qui vient en aide aux hommes en détresse psychologi­que. Il y était déjà allé dans le passé, mais finissait par revenir auprès de sa conjointe.

1500 TEXTOS

Le harcèlemen­t a alors commencé. Isabelle St-louis pouvait lui envoyer jusqu’à 50 textos par jour. Au total, il rapporte que la police a recensé environ 1500 textos et courriels en deux mois. Il lui répondait les premiers jours, puis a voulu qu’elle le laisse tranquille en cessant de communique­r.

Il passait des grands bouts sans lui répondre, mais elle insistait toujours, comme en témoignent les dizaines de pages déposées en preuve lors du procès.

Il avait peur de fermer son cellulaire au cas où il se passerait quelque chose avec ses enfants.

« J’avais peur à toutes les fois, je me sentais très nerveux », dit-il.

M Lévesque affirme avoir changé de numéro de téléphone trois fois et qu’elle finissait toujours par retracer le numéro.

DISPARU

Il a quitté le centre de crise pour aller vivre chez sa tante, à Saint-félix-de-kingsey.

En plus des textos, elle est allée le rejoindre une fois à la sortie de l’église, avec ses trois fils. Il a embarqué avec elle, car il voulait voir ses enfants. Elle l’a amené dans une friperie où elle a essayé une robe de mariée, car ils avaient déjà discuté de renouveler leurs voeux, puis l’a ramené chez sa tante.

« J’ai eu vraiment peur qu’elle me ramène à Saint-rémi », dit-il.

Il raconte qu’elle l’a ensuite rapporté disparu pendant le mois d’août, et que la police est débarquée chez sa tante. Il a alors raconté aux policiers ce qu’il vivait et a montré tous les SMS. Un policier a appelé sa conjointe pour lui signifier qu’il était toujours en vie et qu’elle devait arrêter de le contacter. Les policiers n’étaient pas encore partis qu’elle renvoyait un courriel à M. Lévesque.

« Porte plainte à la police si tu veux, je m’en fous ! Mon Dieu que tu n’as pas de coeur », était-il entre autres écrit, dans les messages déposés au tribunal. Il a porté plainte dans les jours qui ont suivi et l’enquête a commencé.

Les textos ont diminué, puis elle a menacé de le tuer dans une discussion téléphoniq­ue quand elle a reçu les papiers du divorce le 21 septembre 2016, ironiqueme­nt le jour de leur anniversai­re de mariage.

Isabelle St-louis a été accusée en mars 2017. M. Lévesque a eu du mal à témoigner, au mois de septembre dernier.

« J’avais peur. Mon corps me disait de fermer ma gueule, mais ma tête me disait de parler », raconte-t-il.

Entre-temps, M. Lévesque a trouvé du support au Centre de ressources pour hommes de Drummondvi­lle. Cet organisme aide les hommes en difficulté­s à s’outiller, en plus de tenir des groupes de discussion­s.

« SI J’AVAIS ÉTÉ UNE FEMME, ET ELLE UN HOMME, ON L’AURAIT ARRÊTÉE TOUT DE SUITE » – Léopold Stéphane Lévesque

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Isabelle St-louis recevra sa sentence demain.

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