Le Cirque étudie l’émerveillement
280 spectateurs ont été testés en regardant le spectacle O, du Cirque du Soleil, à Las Vegas
Le Cirque du Soleil a équipé ses spectateurs d’un bonnet d’électroencéphalogramme pour comprendre ce qui se passe dans leur cerveau pendant ses spectacles.
L’entreprise québécoise a récemment procédé à l’expérience avec l’aide de scientifiques américains du collectif de neuroscience Lab of Misfits Studio. En tout, 280 personnes ont participé à l’étude lors de dix représentations du spectacle O, à Las Vegas.
Parmi le groupe, environ 60 participants ont accepté de regarder le spectacle munis d’un bonnet d’électroencéphalogramme sur la tête, qui a permis aux chercheurs d’enregistrer leurs réponses neurales.
TESTS PSYCHOLOGIQUES
Après 34 ans d’existence, le Cirque du Soleil voulait démystifier pour la première fois l’émerveillement chez les spectateurs.
« Nous faisons des études de marketing à chaque année, mais nous n’avions jamais réussi à savoir ce qui émerveille vraiment les gens, dit Marie-hélène Lagacé, directrice principale Relations publiques au Groupe Cirque du Soleil. Nous voulions comprendre ce que vivent les spectateurs quand ils assistent à nos créations. »
Les participants ont consacré 2 h 30 de leur temps à cette expérience. « Ils étaient conviés à se présenter 45 minutes avant le début du spectacle, mentionne Élise Tellier, attachée de presse pour le Cirque. Lorsqu’ils arrivaient au théâtre, ils se rendaient dans l’espace VIP d’où ils allaient faire l’expérience. Nous avons fait des tests d’essais avec le bonnet, et ils ont fait quelques tests psychologiques sur un ipad. »
Le Cirque a recruté les 280 personnes par courriel, parmi celles qui avaient déjà acheté des billets pour aller voir O la même semaine, au Bellagio. L’expérience s’est réalisée en collaboration avec des étudiants de l’université du Nevada. En tout, ce sont 23 moments précis de O qui ont été ciblés pour l’étude.
ÉLÉMENT DE DANGER
Et qu’est-ce que les résultats ont permis de déterminer ? Que l’émerveillement permet notamment de vivre pleinement le moment présent. « Avec les réseaux sociaux, les gens sont de moins en moins connectés sur le moment présent, dit Marie-hélène Lagacé. Le petit hamster roule tout le temps. C’était intéressant de voir ce résultat. »
« Cette étude démontre la puissance du divertissement live », dit Beau Lotto, chercheur en neurosciences et fondateur du Lab of Misfits Studio.
Une telle expérience comportait tout de même un risque. Si un accident était survenu durant une représentation et que des spectateurs avaient réagi positivement en le voyant, qu’auraient fait les scientifiques ?
« C’est difficile de répondre à cette question, car, heureusement, aucun accident n’est arrivé, répond Beau Lotto.
L’élément de danger est toutefois probablement en lien avec la perception des gens pour l’émerveillement. Ils aiment voir quelque chose qui semble impossible à réaliser, comme un numéro acrobatique. »
FOCUS GROUPS
Au cinéma et en télévision, on tient régulièrement des « focus groups » auprès du public, afin de savoir s’il faut rajuster le tir avec un film ou une émission. En sachant maintenant pourquoi les gens sont émerveillés par des moments spécifiques, le Cirque du Soleil pourrait-il être tenté de créer ses futurs spectacles avec cette étude en tête?
« Ce n’était pas du tout l’objectif, répond Marie-hélène Lagacé. On ne cherchait pas à savoir comment générer l’émerveillement. Je pense que nos créateurs le savent et le font bien depuis déjà très longtemps. On voulait plutôt approfondir l’expérience de l’auditoire. »